Tristesse, deuil, colère.

Juste deux réflexions : la radicalisation qui produit le terrorisme s'enracine en France dans les politiques du franc fort, des critères de convergence puis de l'euro qui depuis trente ans ont ruiné le tissu économique français, approfondi les inégalités de répartition de la richesse et privé de toute perspective d'avenir des populations de plus en plus nombreuses.

Schengen a signifié, depuis des années, le renoncement à contrôler les trafics d'armes et de n'importe quoi d'ailleurs, en raison de la porosité des frontières extérieures de l'espace et de la fabrication, dans les Balkans, d'Etats mafieux - Kosovo (rappelons que les services secrets allemands... qui écoutent le ministre des Affaires étrangères français ont aussi formé, protégé et armé l'UCK), Monténégro, Bosnie, ARYM, - qui sont des réserves inépuisables pour ce trafic d'armes. L'abandon du contrôle de la frontière (frontière dont Debray a récemment fait le juste éloge) est, pour la lutte contre le terrorisme comme pour la lutte contre toutes les criminalités organisées, une catastrophe.

Là aussi il faut en finir avec ce qu'il est convenu d'appeler l'Europe. Et le plus tôt sera le mieux.

Et puis encore, rentrant de Romans où je donnais hier soir une conférence sur les migrations en Grèce de Byzance à nos jours, je suis arrivé gare de Lyon à 13h55 et 5 min après, à la station Saint-Paul, une annonce passait en boucle avertissant que les trains ne s'arrêtaient plus Gare de Lyon pour des raisons de sécurité... J'ai pensé : si ça se trouve, un mec à tiré dans le tas et je suis passé à travers à 5 minutes près.

Ce soir, ce pressentiment me trouble...

Enfin, hier, en Grèce, était journée de grève générale - une grève à laquelle appelait même Syriza... contre la politique de Syriza. En politique, la schizophrénie se termine rarement bien. En tête de la délégation d'Union populaire Zoï Konstantopoulou avait chaussé des bottes... de 7 lieues ! La veille, elle avait donné donné à Bastamag un entretien qui vaut le détour. Où l'on trouvera notamment cette analyse - que j'avançais dès les lendemains de la capitulation de Tsipras : "Quant à l'intention réelle qui se trouvait derrière la proclamation du référendum, c'est une question très intéressante. Je peux vous dire que mon but en tant que présidente du Parlement, c'était de protéger la démocratie et de rejeter ce chantage. Le but déclaré du gouvernement, c'était de gagner le référendum. Mais durant la semaine de campagne, il y a eu des interventions de la part de membres du gouvernement qui étaient tout à fait contraires à ce but et qui n'allaient pas dans le sens de protéger la procédure. Par exemple, des déclarations de M. Dragasákis, le mardi 30 juin, disant que le référendum serait annulé. En tant que présidente du Parlement, j'ai clarifié publiquement qu'il n'y avait aucune manière de retirer un référendum décidé par le Parlement. Tsípras a aussi fait des interventions qui allaient dans le sens de gagner. Ma conclusion est que Tsípras ne pensait pas qu'il allait gagner. Je pense qu'il avait perdu le sens de la société, et c'est pourquoi il avait l'air aussi surpris par l'ampleur de la manifestation pour le « non », le 3 juillet — la plus grande organisée à Athènes depuis quarante ans."

Quant à la grève contre le mémorandum Tsipras, pire que les mémoranda Papandréou et Samaras réunis, qui a mis le peuple grec dans la main de fer sans gant de velours des maître chanteurs européens, j'en suis bien sûr solidaire, moi le gaulliste de gauche (si si, ça existe... pas qu'au zoo !), qui le reste et qui le suis même chaque jour davantage, parce que la nation est émancipatrice, parce que c'est dans le cadre national que s'est construite la démocratie et que les systèmes d'identification permettent qu'elle fonctionne, parce que c'est seulement dans le cadre national qu'elle peut se réinventer, et se radicaliser, aujourd'hui, face aux attaques de l'oligarchie qui a voulu le cadre européen pour démonter tout ensemble la nation, la démocratie et l'Etat social, parce que si l'on ne reconquiert pas la souveraineté populaire ou nationale (c'est la même chose) par la gauche, afin de changer de politique vraiment et de reconquérir les leviers d'action sur le réel (monnaie, écluses douanières, nationalisation sans indemnité des banques, redistribution des richesses...), l'extrême droite continuera de la monopoliser et de progresser - inexorablement. Quels que soient les discours moraux, les petites fusions entre faux ennemis et autres magouillages des défenseurs de l'oligarchie.

Enfin, en ce jour sombre, une nouvelle m'a réjoui : en pleine crise qui s'approfondit, il semble qu'en Finlande, dont le gouvernement a été l'un des plus durs avec la Grèce, la question soit désormais posée et largement débattue d'une sortie de l'euro afin de pouvoir récupérer la possibilité de dévaluer la monnaie et relancer ainsi l'économie.

Entre cette excellente nouvelle et celle que le Premier ministre portugais de droite, si furieux d'avoir été censuré par la majorité de gauche qu'il entend changer la Constitution - tant il est vrai que la démocratie de coup d'Etat permanent façon Union européenne, la Constitution, l'Etat de droit qui figurent parmi ses principes intangibles de l'UE, on s'assoit allègrement dessus si jamais les oligarques tenants de TINA sont menacés de devoir quitter le pouvoir qu'ils considèrent leur (en France après un référendum, en Grèce, au Portugal...) - on se dit que cette Europe branle dans le manche de tous les côtés.