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lundi 21 décembre 2020

Deuil

Il y aura une semaine demain, à l'aube, une guerrière, une précieuse camarade de combat et une très chère amie est décédée. Coralie Delaume a été emportée en un an par un cancer particulièrement pervers et virulent... De loin nous l'avons accompagnée en espérant qu'elle pourrait prendre le dessus sur le crabe. En mars dernier, à Paris, je l'ai revue pour la dernière fois chez nous, avec un ami commun qui a été très proche d'elle durant les derniers mois.

Elle avait 44 ans ! L'âge où l'on s'accomplit.

Elle devait venir se faire chouchouter ici après son opération, puis lorsqu'elle nous a appris qu'elle ne pouvait être opérée parce que le mal était déjà trop diffusé en elle, nous nous étions entendu pour qu'elle vienne ici à Pâques prochain, une fois que le traitement destiné à la stabiliser aurait produit ses effets. Mais il n'a pu endiguer le mal...

Je n'avais plus pleuré depuis la mort de maman.

Coralie va tellement nous manquer ! qu'il s'agisse de l'amie ou de l'infatigable combattante contre le monstre européen.

Front Populaire m'a demandé un hommage à "ma" Coralie : le voici !

dimanche 13 décembre 2020

On t'aime Tom !

Un superbe article sur notre copain Tom ! Ca éclaire notre journée !!!

Lorsque je me suis installé une première fois à Nisyros, pour deux ans, en 1997, dans l'autre village des hauteurs. Il y avait un jeune peintre anglais.

L'été précédent, après avoir vu le portrait d'une des figures de l'île, une espèce de Zorba en un peu plus alcoolisé, et demandé qui avait peint ce portrait, nous étions montés voir cet artiste qui avait sorti pour nous dans la rue écrasée de soleil, une quinzaine de toiles de grandes taille, aussi belles les unes que les autres.

Moment magique !

Nous avons demandé les prix... Tom a toujours aimé le dessin, ce n'était pas à la mode aux Beaux Arts de Londres. Il nous a raconté plus tard comment il s'était attiré les bonnes grâces du concierge qui lui ouvrait le petit local où on avait remisé les antiques qu'il était devenu has been de s'exercer à dessiner. Ses grandes admirations vont à Velasquez et Bacon.

A sa sortie de l'école, comme tout le monde, Tom faisait de l'abstrait sans intérêt, grisâtre. Il a eu une bourse pour venir en Grèce, avec sa compagne italienne, une volcanique Calabraise. Il y a découvert la lumière et la couleur.

Et quand la bourse a été épuisée, ils ne sont pas repartis. Ils sont arrivés à Nisyros, où le président du conseil paroissial de Nikeia leur a permis un temps de loger dans les dépendances d'une petite église perdue dans un coin près de la mer, au bout d'une longue route à l'époque en terre battue. Puis ils se sont installés dans une maison de Nikeia dont le toit fuyait lors des pluies mais dont ils ont fait un lieu aussi chaleureux qu'eux. Vivant de petits boulots (Ornella lavait des draps pour les chambres à louer de la mairie, Tom nettoyait les toilettes publiques...), ils étaient dans la dèche quand nous avons débarqué et qu'il nous a sorti les toiles dans la rue. Tom m'a dit plus tard qu'il leur restait alors, je crois, 150 drachmes. Sa galerie londonienne ne l'avait pas suivi lorsqu'il avait abandonné l'abstrait grisâtre, il n'avait rien vendu depuis.

Nous avons demandé les prix ; nous n'étions pas d'accord, Frédéric et moi, sur la toile que nous avions décidé d'acheter et de rapporter à Paris. Nous lui avons dit que nous reviendrions le lendemain après en avoir discuté pour prendre celle que nous aurions choisie. Tom m'a dit plus tard qu'il avait eu un sérieux coup de blues après notre départ : encore un espoir qui s'en va, ils ne reviendront jamais. Mais comme les prix d'alors nous le permettaient, lorsque nous sommes remontés le lendemain, nous avons pris les deux toiles et Tom m'a dit ensuite qu'ils s'étaient alors payé leur premier resto depuis des mois et eu de quoi vivre pendant pas mal d'autres ! C'est peut-être une des décisions de notre vie, à Frédéric et à moi, dont nous restons le plus heureux !

C'est Tom et Ornella qui m'ont trouvé la maison que j'ai louée à Alina pendant deux ans. Deux ans pendant lesquels j'ai écrit Le Plongeon et Le Château du silence. Nous avons mangé si souvent ensemble, discuté de la création en peinture et en littérature... Comme ma maison était exposée au sud, Tom me donnait ses nouvelles toiles à sécher dans ma chambre...

Il a fait le portrait de Frédéric, d'abord, puis le mien que vous pouvez voir en page de couverture de mon site en passant le curseur sur ma photo (olivier-delorme.com), et qui pour moi est une manière de Fayoum. Jai posé des heures pour lui, dans son petit atelier - expérience étrange et pas forcément très agréable de voir son visage se dessiner, s'effacer... Cette expérience et ce malaise, je m'en suis servi dans le Château du silence, dont Tom et Ornella ont fourni le modèle à des personnages - et c'est une toile de Tom qui en est la couverture.

Il a gagné un prix avec mon portrait ; un ami a vu partir celui de Frédéric sous le bras de son acheteur (un Américain, je crois) alors que, sur notre conseil, il venait voir les toiles de Tom dans sa nouvelle galerie. Car entre-temps Tom avait gagné le prix de la British Portrait Gallery avec son autoportrait (reproduit dans l'article, la pièce à fond vert) dans l'apotiki de notre voisine commune, la délicieuse Evghénia, plus de 80 ans, chez qui j'allais cueillir mes citrons, sur qui nous veillions et qui m'appelait aux offices de Pâques, d'une maison à l'autre, de sa voix de stentor : "Olivierrrrrrr Ekkliiiiiiiiiiseiiiiiiiaaaaaaa !!!!" - et avec une commande publique à la clé. Et une galerie de Soho a commencé à lui organiser des expos.

Ces deux années-là sont parmi les plus heureuses de mon existence. Nous avons toujours regretté de ne pas avoir acheté une toile de la superbe série de morceaux de corps de nageurs dans des fonds d'un bleu superbe. Nous en avons acheté quelques autres quand ses prix, qui ont vite bondi avec la commande publique et les acheteurs fortunés qui ont afflué, nous le permettaient. Tom et Ornella ont quitté Nisyros un an après mon départ ; ils se sont séparés.

Aujourd'hui, avec sa compagne grecque, il s'est lancé dans une nouvelle aventure à Lesbos, avec une maison qui accueille des stages de peinture.

On aime toujours autant ce qu'il fait ; on est allé le voir plusieurs fois dans son atelier d'Athènes ; nul doute qu'on ira les voir à Lesbos !

Mille bravos pour cet article, Tom ! On t'aime !!!

Frexit ! La pétition

Evidemment j'ai signé, et évidemment je vous appelle à signer et faire signer !

vendredi 11 décembre 2020

Acropole inondée et sommet européen...

Voilà déjà bien des années que je m'interroge (euphémisme) sur la frénésie - en Grèce, dans les "grands sites" qui drainent la masse des touristes - d'anastylose (reconstruction présumée à l'identique) à tout prix avec des matériaux dont la couleur, la patine, l'usure, sont évidemment très différentes des morceaux d'origine qui apparaissent désormais, de plus en plus souvent, noyés dans les morceaux "restitués".

Retournant une fois de plus l'an passé à Lindos, j'ai été attristé (euphémisme) par ces anastyloses que je considère abusives. Et j'ai été ravi de trouver, à Dion - site très important mais peu fréquenté -, des vestiges en l'état, dans une nature superbe, laissant toute place à l'imagination et à la flânerie.

J'ai en réalité bien peur que cette frénésie ne soit l'expression d'une volonté de transformer les sites archéologiques en disneylands archéologiques, le visiteur - comme le lecteur, le téléspectateur, etc. - étant considéré a priori faible d'esprit et donc incapable, en l'occurrence, d'imaginer ce qu'il ne voit pas, ce qu'on ne lui met pas sous le nez avec des pierres neuves... alors que ces anastyloses sont de toute façon menteuses puisque, si l'on veut restituer, il faudrait aussi peindre de couleurs vives ce que l'on restitue.

Sans compter que c'est un gaspillage d'argent qui pourrait être consacré aux fouilles nouvelles, à la muséographie vieillotte de certains musées... D'autant qu'à l'heure des restitutions en 3D, on pourrait imaginer de laisser les sites en l'état et de présenter, à côté, dans les musées attenants aux sites, des restitutions complètes... en en couleur !

A mes yeux, les travaux de l'Acropole qui ont lieu depuis des années et témoignent de cette frénésie, sont une catastrophe. Mais avec ces chemins de béton on atteint le comble de l'absurde lorsqu'on constate que, pour faire marcher plus de touristes sur ce lieu qui, de son histoire, n'a jamais connu d'inondation, on aboutit à ce résultat.

Le tourisme de masse, par ce qu'il suppose et engendre, est une catastrophe. Je ne veux pas me ranger du côté de ce vieux réac de Morand dont le Venises est aussi un pamphlet contre ce tourisme-là - dont il n'a connu que les prodromes !

Issu d'une famille modeste, de parents qui n'avaient pas eu la chance de faire des études (papa le certif, maman avait le brevet) mais qui étaient de grands curieux, forgé par les voyages qu'ils nous ont fait faire en Italie quand nous étions gamins, Brigitte et moi, par les visites de musées, de Pompéi et d'Herculanum, des tombes étrusques ou des temples de Paestum, je ne veux pas dire que l'accès de ces lieux devrait être réservé à une élite, de l'argent ou du savoir. Mais je pense qu'il conviendrait de commencer à réfléchir sérieusement à ce que le patrimoine de l'humanité ne soit pas vu SEULEMENT comme une machine à cash.

Sinon, à l'heure où Erdogan déclarait que l'Azerbaïdjan et la Turquie n'avaient pas fini de régler leur compte aux Arméniens, à l'heure où l'on sait qu'en plus des djihaddistes transformés en supplétifs de l'armée turque, Turcs et Azéris ont employé au Karabagh des armements prohibés - bombes au phosphore et bombes à sous-munitions -, que les prisonniers arméniens sont maltraités et torturés, où les provocations turques contre la Grèce et Chypre continuent... le Conseil européen vient une fois de plus de renvoyer les sanctions contre l'islamo-impérialisme turc aux... calendes grecques. Celles, individuelles, qui sont annoncées "pour les prochaines semaines" sont une pitrerie et une imposture européennes de plus.

Pas question pour la Führerin du Reich de remettre en cause ses 2,5 milliards d'excédents commerciaux ou de mécontenter ses électeurs turcs ! Pas question pour l'Espagne et l'Italie, principaux fournisseurs d'armes à l'islamo-impérialisme turc avec les Etats-Unis, de se priver de ce marcher... et peu importe que les armes qu'ils vendent soient dirigées contre deux Etats de l'Union ! Pas question pour l'Espagne d'exposer ses banques gavées de dette turque (juste un peu plus que les banques italiennes) et qui se trouveraient en fâcheuse posture si la Turquie faisait défaut... pas question pour le tyran Orban de remettre en cause ses excellentes relations avec le tyran Erdogan, ni de trahir la fidélité à l'organisation pantouraniste dans laquelle la Hongrie est observateur ! Pas question pour le petit Etat pirate maltais de renoncer au pourboire des Turcs riches qui y achètent à prix d'or des passeports européens de complaisance !

Tous ceux-là ont oublié que si l'on n'arrête pas un impérialiste, on l'encourage : l'Anschluss après la remilitarisation de la Rhénanie, les Sudètes après l'Anschluss, la Tchécoslovaquie après les Sudètes, Dantzig après la Tchécoslovaquie. Et après ?

Quant à ceux qui ne comprennent pas, désormais, ce qu'est l'UE, ça ne peut être que parce qu'ils ne veulent pas comprendre.