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mercredi 30 avril 2008

Virée alsacienne

Strasbourg est une ville que j’adore.

Pas très original, mais la cathédrale est vraiment une merveille ; plus encore en ce jour éclatant de printemps, en plein soleil. La vie d’écrivain n’est donc pas pavée que de désagréments et, comme pour mes deux précédents passages, la FNAC m’avait réservé une chambre à l’Hôtel Cathédrale (dont le personnel est d’une gentillesse et d’une attention franchement hors du commun) : se réveiller, tirer les rideaux et traînasser en contemplant de son lit la dentelle de pierre rose est un moment de pure félicité.

Avec une tendresse particulière pour les deux cigognes (mais je leur trouve, moi, des airs d’ibis) perchées sur deux des pinacles aux angles des tours : le bec détaché dans un azur absolument pur et limpide, vendredi.

Bon, à part ça, il y a eu aussi le travail : une irréprochable choucroute à la Maison Kammerzel et, juste après, dans les vapeurs de riesling et de marc, un entretien avec Jenny Ulrich pour Radio Bienvenue Strasbourg (taper les trois lettres en haut à droite dans la fenêtre située à côté, puis taper sur le bouton "Download", attendre les 45 secondes puis taper sur "Free Download" et, en principe, I-Tune s'ouvre pour vous permettre d'écouter l'émission): la seule interviouve (tiens, je l’aime bien celle-là, je vais m’en servir comme de coquetèle et ouiquende) pour laquelle on doit chausser ses lunettes, parce que Jenny vous fait parler sur trois images qu’elle a sélectionnées en lisant votre bouquin. Car imaginez-vous qu’en province, comme en Belgique, les journalistes lisent les livres même quand ils ne sortent pas des presses des dix éditeurs qui achètent de la pub et se renvoient les ascenseurs : autant dire des fous !

Puis j’ai fait mon forum Fnac avec Guy Wach de France bleue : c’est bien les journaliste qui aiment et savent lire ! Guy est de ceux-là. Merci Guy !

Merci aussi à Alain Walther (de la com) et Philippe Schiappapietra (libraire) qui me suivent et me soutiennent depuis mon Château du silence. On ne dira jamais assez combien un libraire qui vous aime, sait et peut vendre vos livres ; depuis Le Château, la Fnac de Strasbourg est une des librairies de France qui me vend le plus.

Mais maintenant, je connais un deuxième libraire strasbourgeois : Gilles Million de L’Usage du monde qui m’a accueilli sur son stand à la 25e Foire du livre de Saint-Louis, samedi et dimanche, après que la radio du Haut-Rhin Florival avait diffusé une interviouve de bibi vendredi. Car l’intérêt de ce genre de manifestation pour un auteur d’une petite maison (par la taille et la surface médiatique s’entend, pas par la qualité), c’est non seulement de toucher des lecteurs qui ne vous rencontreraient pas autrement (mission accomplie et même un peu plus pour Saint-Louis, mon meilleur salon, à part Brive, mais Brive... c'est un micro-climat exceptionnel pour le livre et le foie gras !) mais aussi d’établir un lien personnel avec des libraires.

Et Gilles c’en est un vrai ! Passionné, chaleureux, curieux.

Le courant est passé ; je doute qu’on ne se revoie pas bientôt. Pour le reste, cette foire de Saint-Louis était organisée de main de maître. On va trouver que je dis beaucoup merci aujourd’hui, mais j’en dirai un de plus à Denise Fuentès.

Pour avoir organisé des colloques dans ma première vie, je sais quel travail acharné, quel investissement personnel nécessite l’organisation matérielle d’une pareille manifestation. Organisation parfaite en l’occurrence.

Mais en plus, l’auteur n’est pas toujours une bête facile à cornaquer. Il y en a même de franchement insupportables (j’ai quelques noms si vous voulez). Alors parvenir, avec le sourire toujours, à faire que, pendant trois jours, ce microcosme vive dans l’harmonie, apaiser les tensions, materner un rien ceux qui ont besoin de l’être, ménager les susceptibilités de ceux pour qui sortir de la cuisse de Zeus est une origine bien vulgaire, tout cela avec le sourire et la gentillesse en plus de l’efficacité : chapeau Mme Fuentès !

Nous avons de la chance, nous autres écrivains, malgré les dysfonctionnements d’une édition qui surproduit pour pouvoir maintenir debout une économie fondée sur la cavalerie des offices, qui tue les livres plus vite que son ombre, qui les remplace par des produits revus et corrigés par les spécialistes marketting, qui substitue aux écrivains des journalistes, des "fils de" ou des actrices médiocres, pourvu que tous affichent l'étiquette "vu à la télé", malgré les dysfonctionnements d’une critique totalement nomenklaturiste, c’est que le livre dispose encore de légions de passionnés capables de donner leur temps et leur énergie pour monter des foires comme celles de Saint-Louis, de curieux capables d’acheter des livres que la Nomenklatura ignore superbement.

mercredi 23 avril 2008

Et deux foutages de gueule ! deux !

Le premier m’a sauté aux yeux, hier soir, pendant le dîner : une pub sur les douleurs professionnelles !

Non mais de qui se moque-t-on ? !

La médecine du travail est dans un état lamentable : plus de 2000 médecins du travail doivent partir en retraite d’ici à 2012, alors qu’à peine 300 auront été formés à cette date pour les remplacer ; et on vient faire de la pub à la télé !

On taxe les malades chroniques, à travers les franchises médicales, on taxe donc les caissières et les ouvriers du bâtiment, mis en scène dans ce spot, qui iront consulter pour traiter leurs douleurs ; et on vient faire de la pub à la télé ?

Mais à destination de qui, au juste ? Les gens qui souffrent, souffriront-ils moins ? Les médecins du travail en auront-ils demain les moyens qui leur manquent aujourd'hui pour faire décemment leur boulot ? Les patrons seront-ils touchés par la grâce publicitaire et décideront-ils du coup d’investir pour le mieux être de leurs salariés, au détriment des profits et des dividendes ? À quoi sert donc une pareille pub ? À rien. Sinon à dépenser de l’argent public qui va directement dans la poche des chaînes privées !

La solution des douleurs professionnelles n’est pas dans des spots de pub, elle est dans la suppression des iniques et dégueulasses franchises médicales qui pénaliseront les victimes de ces douleurs lorsqu’elles devront aller consulter, dans les moyens qu’on donnera à la médecine du travail, dans des pouvoirs accrus aux comités d’hygiène et de sécurité, dans la pénalisation des patrons qui ne voient aucune utilité à modifier les conditions de travail de leurs salariés.

Quant au deuxième foutage de gueule, c’est le bal des faux-culs auquel on assiste depuis quelques jours autour de la grève des sans-papiers. Personne ne savait, mais tout le monde empochait, à commencer par l’État et la Sécu.

Mais bon Dieu, de nom de Dieu de bordel de merde, dans quel pays vivons-nous ! et pourquoi au juste sont payés nos parlementaires ?

Combien de lois sur l’immigration ont-ils voté ces dernières années: six, dix ou quinze en une décennie ? ? ?

Ils légifèrent à tour de bras et à répétition sur le même sujet, mais depuis quel empyrée ? Ils légifèrent hors-sol, coupés de toutes les réalités. Ils légifèrent bien trop d’ailleurs, chiant des lois à jet continu là où il n’y aurait besoin que de décrets et de circulaires. Sans prendre le temps de les faire appliquer, d’en évaluer les effets – eux qui n’ont que le mot d’évaluation à la bouche quand il s’agit de casser les dernières protections de ces salauds de fonctionnaires.

Et pour quel résultat ? pour se rendre compte, après quinze lois sur l’immigration, que des dizaines de milliers de gens travaillent, contribuent au budget de la nation, payent leurs cotisations aux régimes sociaux sans seulement pouvoir obtenir les papiers qui leur permettent de vivre et de faire vivre les leurs dans le minimum de tranquillité d’esprit de n’être pas, demain, raflés et renvoyés au-delà des mers pour remplir des quotas !

Saloperie !

Eh bien moi, messieurs les députés et sénateurs, je ne vois que deux solutions : ou bien vous êtes de sinistres cyniques prêtant la main à l’exploitation de la misère humaine, ou bien vous êtes des jean-foutre totalement incompétents.

mercredi 16 avril 2008

Il y a des moments intenses dans une vie d'écrivain...

Des moments de grâce absolue, qui payent de toutes les déconvenues, de tous les découragements, dont on se souviendra lorsqu’on se demandera pourquoi on continue à écrire, parce qu’on n'y arrive pas, qu’on en a marre, qu’on désespère de se battre contre les moulins à vents de medias cadenassés, et où l’on trouvera la force de repartir en avant parce que ces moments-là payent de tous les autres, parce que c’est pour ces moments-là qu’on écrit.

Hier, j’étais déjà plutôt content : je m’étais trouvé plutôt bien durant les deux heures d’entretien avec Laurent Dehossay, sur La Première chaîne de radio de la RTBF (un lien sur la page Presse de ce site vous permet de réécouter l’émission). Et, puis, pendant que j'étais en train de préparer les ris de veau à la crème du dîner, Frédéric m'a appelé : je venais de recevoir un message d’un lecteur handicapé.

Puisque ce lecteur m'a donné l’autorisation, ce matin, de reproduire son courriel, le voici :

« Bonjour,

Je viens d'achever L'OR D'ALEXANDRE et je suis bouleversé : je voulais simplement vous dire un immense MERCI ...

J'ai tenté de modérer mes émotions pour écrire une modeste "critique" que je viens de publier sur le site Handigay.com

Trop de points communs avec Philippe pour ne pas vibrer à chaque page... J' ai lu à mon ami les passages qui nous concernaient le plus, "vieux" couple gay frappé par un "crash" en 2004, et vous m'avez offert des moments parmi les plus beaux de ces dernières années.

Voilà c'est tout, j'essaierai de venir vous saluer si vous passez dans un salon sur la Côte d'Azur, j'habite à Juan les Pins.

Cordialement, Gérard »

Des larmes dans les yeux… Sa critique, sur le site, est superbe, mais ces mots-là sont pour moi plus précieux que toutes les critiques !

La Quatrième Révélation était née du récit, par un ami, d'un meurtre homophobe, à la suite duquel son copain avocat avait défendu la famille de la victime, de la nécessité absolue que j'ai éprouvé alors d'écrire là-dessus.

L'Or est né de ma rencontre avec Michel Robert qui, de la même manière, m'a rendu indispensable de parler du handicap. C'est Michel qui m'a permis de l'écrire en me faisant confiance, parce que c'est grâce à lui, à la manière dont il a répondu à toutes mes questions que j'ai pu donner sa chair à mon Philippe.

La trouille ! cet été, quand je lui ai envoyé le manuscrit. Il habite Ay, nous Paris. Et s'il me disait que j'avais mis à côté de la plaque ? Deux ans et demi de vie et de travail. Il ne m'a fait qu'une remarque... sur le coussin anti-escarre.

Puis il y a eu L'article de Yanous, qui avait levé une partie de mes craintes. Mais la trouille ne s'était pas pour autant dissipée : comment réagiraient les lecteurs handis ? Comment considéreraient-ils, venant d'un valide, mon parti pris d'aller droit au but, mon pari du ton que j'ai adopté, du caractère que j'ai dessiné, mon absolu refus du pathos ?

Et voilà ces mots de Gérard, un lecteur handi et inconnu : ils me comblent, ils me… justifient. Ce matin, une bonne critique est sortie dans ''Fugues'', au Québec, et elle m'a fait plaisir, bien sûr, mais rien à côté du choc émotionnel ressenti hier soir à la lecture des quelques mots de Gérard.

Merci Gérard ! Merci mille et quelques fois !

mardi 15 avril 2008

Vive les Tudor !

Nous n'avons pas Canal+, mais apparemment, le câble nous offre depuis quelques semaines un accès en clair à la chaîne... j'imagine pour un temps limité. Tout ce que j'espère, c'est que cela durera jusqu'à lundi prochain et que je pourrai voir les deux derniers épisodes de la première saison d'une époustouflante série intitulée Les Tudor.

C'est aussi beau, aussi réussi que la première version des Rois maudits. C'est haletant, c'est prenant, décors superbes, costumes somptueux (ah! les essayages d'Henri, à moitié torse-poil), acteurs impeccables... c'est une merveille de télévision comme savait autrefois en produire la télé française. Je me souviens de Richelieu, de Mazarin , d'Offenbach...

Et puis il faut bien dire qu'Henri VIII et son copain Suffolk sont absolument torrides... même quand ils ne baisent pas.

La photo vient du site de Canal

Larmes de crocodiles, famine et inflation

Voilà plus de vingt ans qu'on nous pompe l'air avec la libéralisation des échanges, la mondialisation heureuse et les déréglementations tous azimuts - conditions du bonheur universel. Et voilà trois jours qu'on commence à verser des larmes de crocodile sur le retour des émeutes de la faim, sur les menaces de famine... mais sans, naturellement, faire le moindre rapport entre les deux.

Et pourtant, ouvrir les marchés, faire tomber les barrières douanières, mettre en concurrence les agricultures industrielles et les petits producteurs vivriers, le faible et le fort qui dispose de tous les moyens de l'écraser, donner le pouvoir au Marché et aux spéculateurs ne pouvait qu'aboutir à ce résultat-là. Comme le gel des terres et les politiques de quota mises en oeuvre par l'Europe ne pouvaient aboutir, chez nous, qu'à la hausse vertigineuse des prix alimentaires qui est en train de conduire de plus en plus d'humbles travailleurs et retraités au bord de la misère.

Mais non ! le Marché s'autorégule, le Marché est omniscient, le Marché est infaillible... la preuve ! en quelques semaines, la crise financière des subprime, Kerviel, le retour du spectre de la famine, l'appauvrissement alarmant des salariés et des retraités dans les pays développés...

Le Marché ne s'autorégule jamais. Si la famine a été éradiquée, c'est que dans les années 60-70, des politiques volontaristes qui s'appellent la révolution verte appuyées sur des protections douanières ont été menées par les Etats. La suppression des systèmes de subvention, de prix garantis, la condamnation de tout interventionnisme étatique et le libre-échange généralisé rendent naturellement non viables les agricultures locales vivrières, mettent des peuples entiers entre les mains anonymes de spéculateurs qui sont responsables de 80% de la hausse récente des prix de l'énergie comme des matières premières alimentaires.

Attention, le libéralisme tue !

Le Marché ne s'autorégule jamais ! La crise de 29 qui a conduit à la seconde guerre mondiale l'a amplement montré. Et c'est pour l'avoir oublié, pour avoir privatisé tout et n'importe quoi, fait de secteurs d'utilité publique des sources de profit, dérégulé et dérégulé encore, jusqu'à revenir sur les règles édictées après 1929 justement, qu'on a engendré un Frankenstein financier totalement coupé de toute véritable création de richesse, d'une perversité telle qu'elle conduit aujourd'hui à la crise bancaire et aux exploits d'un Kerviel qui ne sont que des symptômes. Mais remarquez bien que si le scandale du Lyonais a pour jamais déconsidéré l'Etat patron décidément incapable de gérer correctement quoi que ce soit, les actuels scandales en chaîne ne semblent nullement déconsidérer le système... Forcément les banquiers ont empoché les profits pendant vingt ans et ce seront les contribuables qui épongeront les pertes.

Attention, le libéralisme rend amnésique !

Le Marché ne s'autorégule jamais ! La concurrence idéologique avec le communisme de 1917 à 1990 avait contraint le capitalisme à se soucier des humbles, à ne plus les écraser de manière cynique, à protéger le bien-être minimal du plus grand nombre. L'Etat providence en est né. Son démantèlement, à partir des années 90 n'est nullement dû au fait qu'il coûte désormais trop cher pour des économies qui ne pourraient plus le supporter. La richesse globale a augmenté de manière considérable. C'est qu'il n'est plus nécessaire aux yeux de ceux qui profitent du système, alors que la concurrence idéologique a disparu et qu'il limite donc, désormais inutilement, leurs profits. L'Etat providence ne coûte pas trop cher pour l'état de l'économie, il doit être démantelé pour permettre la poursuite d'un mouvement, maintenant vieux d'un quart de siècle, qui conduit à une redistribution massive des profits au profit du capital, à la baisse continue de la part des profits qui revient, directement ou non, aux salariés. La taxation des malades chroniques, autrement appelées franchises médicales, n'était à cet égard qu'un coup de sonde, ainsi que viennent de le montrer les dernières déclaration de Mme Bachelot qui annoncent désormais la privatisation progressive de l'assurance maladie.

Attention le libéralisme rend sourd et aveugle !... et la Sécu ne remboursera bientôt plus les lunettes... ni les dents, ce qui importe moins, finalement, puisque les assiettes seront vides de ceux qui n'auront pas les moyens de s'en payer de nouvelles.

L'Europe a été, chez nous, l'alibi et l'agent le plus efficace de cette politique d'appauvrissement des humbles, comme l'OMC a construit les famines qui s'annoncent aujourd'hui. Ainsi du sieur Trichet et des irresponsables de Francfort qui appellent aujourd'hui à la modération salariale contre l'inflation. Et de nos hommes politiques, jamais en retard d'un hypocrisie, appellant à la réduction des déficits qui viennent alimenter la dette que devront payer nos pauvres enfants !

Foutaise !

Un Etat n'est pas un ménage. L'économie n'est pas une science exacte et n'est régie par aucune loi naturelle ou révélée.

Interdire l'endettement, renoncer aux barrières douanières et imposer un euro fort, c'est ce qui permet de faire des salaires la seule variable d'ajustement de l'économie, de ne laisser aux salariés que le choix entre la misère ou le chômage : nous devons rester compétitif, l'euro fort est un handicap à nos exportations ; si vous voulez que nous maintenions vos emplois, vous devez consentir des sacrifices.

Quant à l'inflation, elle n'est que le moyen de rembourser la dette de nos pôvres enfants à qui nous laisserons les conséquences de notre irresponsabilité en faisant payer le capital et la rente, plutôt que les salariés. Elle n'est pas un mal en soi ; elle est même, à mon avis, aujourd'hui historiquement nécessaire, comme il est nécessaire de rétablir aujourd'hui des barrières douanières autour de l'espace européen pour compenser les déséquilibres dûs à des concurrences déloyales, comme il est nécessaire aujourd'hui de dévaluer l'euro et d'exercer les pressions nécessaires sur les Etats-Unis pour obtenir, enfin depuis 1974, une négociation sérieuse sur la reconstruction d'un système monétaire international stable .

L'échec de la gauche européenne tient avant tout à son ralliement, avec arme et bagage à la vulgate libérale et au libre-échange généralisé, dont DSK est sans doute le symbole le plus abouti. Sa défaite c'est d'avoir renoncé à agir sur le système pour se contenter par des mesures charitables d'en limiter les conséquences les plus douloureuses - le syndrome Martin Hirsch en somme. Les défaites des Royal et des Prodi face aux Berluskozy et autres Sarconi ne sont pas seulement contingentes, elles sont avant tout la conséquence de l'abdication idéologique des socialistes européens dont le point nodal est sans aucun doute à mes yeux la signature du traité de Maastricht et la définition des pouvoirs et missions de la Banque centrale.

lundi 14 avril 2008

Un pas de plus en direction de... Vichy

Merci à tous les amis de la Liberté, à tous ceux aussi qui ne se rappellent même plus que qu'avant Gaston Defferre, les homosexuels de ce pays étaient fichés, de relayer et diffuser cet appel du Collectif contre l’homophobie (Association loi 1901, fondée en 1997, 9 rue Joachim Colbert – 34000 Montpellier). Depuis un an, les lois scélérates et les mesures liberticides se multiplient incidieusement, pas après pas, au nom de la sécurité ; jusqu'où allons-nous l'accepter ? jusqu'à ce qu'il soit trop tard ?

Montpellier, le 14 avril 2008

Communiqué de presse

Non à l’utilisation du logiciel Ardoise dans la police et la gendarmerie nationales !

Non au profilage catégoriel demandé par Michèle Alliot-Marie, Ministre de l’Intérieur !

Non au retour du fichage !

Depuis plusieurs semaines, le Collectif contre l’homophobie (C.C.H.) reçoit des témoignages alarmants de policiers et de gendarmes au sujet du projet du Ministre de l’Intérieur de remplacer le logiciel LRP (Logiciel de Rédaction de Procédure) et le logiciel STIC (Système de Traitement des Infractions Constatées) par le logiciel ARDOISE (Application de Recueil de la Documentation Opérationnelle et d’Informations Statistiques sur les Enquêtes).

Ce nouveau logiciel « Ardoise » reprend toutes les fonctionnalités des logiciels LRP et STIC mais à une différence notable et problématique, il prévoit de renseigner des caractéristiques personnelles de toute personne entendue comme victime, témoin ou auteur dans une procédure.

Ainsi le policier ou le gendarme peut préciser dans la rubrique « Etat de la personne » les informations suivantes « homosexuel », « transsexuel », « handicapé », « sans domicile fixe », « personne se livrant à la prostitution », « travesti », « relation habituelle avec personne prostituée », « personne atteinte de troubles psychologiques », « usager de stupéfiants », « permanent syndical » …

La saisie de ces informations a vocation à établir une fiche profilée de chaque personne ayant un contact avec la police dans le cadre d’une procédure ; cette fiche sera consultable sur toute le territoire national par les forces de l’ordre, et notamment à chaque fois que cette personne aurait à faire à elles.

Nous partageons le malaise de nombreux policiers et gendarmes ; comme eux, nous avons du mal à saisir l’intérêt de la mention de certains détails et les finalités de ce profilage.

Nous sommes particulièrement inquiets face au risque de constitution de fichiers catégoriels que ce logiciel pourrait permettre. Sans remonter à la période sombre de la Seconde Guerre Mondiale pendant laquelle des membres de certaines minorités furent fichés et déportés, nous voulons rappelons le fichage (par les brigades mondaines) et le harcèlement policier subi par de nombreuses personnes (notamment homosexuelles) des années 50 aux années 70.

Il a fallu l’élection de François MITTERRAND à la Présidence de la République en 1981 pour que l’homosexualité soit dépénalisée par le Ministre de la Justice Robert BADINTER (loi du 5 août 1982) et que les fichiers d’homosexuels soient détruits à la demande expresse du Ministre de l’Intérieur Gaston DEFFERRE.

Nous n’accepterons pas que Michèle ALLIOT-MARIE autorise l’utilisation de ce logiciel car il peut donner lieu à des dérives de sinistre mémoire. Le Collectif contre l’homophobie (C.C.H.) saisit ce jour

- La HALDE (Haute Autorité de Lutte contre les Discriminations)

- La CNIL (Commission nationale de l'informatique et des libertés)

- La CNCDH (Commission Nationale Consultative des Droits de l’Homme)

Par ailleurs nous lançons un appel solennel à toutes les organisations de défense des droits de l’Homme, à tous les syndicats, à toutes les autorités morales et philosophiques, à tous les parlementaires pour qu’ils s’engagent contre le logiciel ARDOISE. Nous demandons à Michèle ALLIOT-MARIE, Ministre de l’Intérieur de surseoir à l’application de ce logiciel litigieux et problématique. Nous demandons au Premier Ministre et au Président de la République de nous recevoir afin d’évoquer ce problème.

Hussein BOURGI Le Président 06 89 81 36 90

samedi 12 avril 2008

L'Or d'Alexandre à la RTBF

L'Or d'Alexandre poursuit sa route et les premières indications sur la réception de ce livre montrent que de nombreux libraires se sont souvenus du succès de La Quatrième Révélation, que mes lecteurs me suivent et me sont fidèles, que leur cercle s'agrandit. Merci à tous !

Quant aux médias, une fois de plus la bonne nouvelle vient de Belgique. Après un premier passage à "Culture club" à l'invitation de Corinne Boulangier et la page dans le Metro belge (les liens pour écouter l'émission et lire l'article sont dans la page Presse), "La Première" chaîne de radio de la RTBF, m'accueille de nouveau sur ses ondes, les lundi (14/4) et mardi (15/4) prochains, de 16h00 à 17h00. C'est Laurent Dehossay, cette fois, qui me reçoit, comme il l'avait fait dans son "Tête à tête" pour ma Quatrième Révélation, pour deux heures d'entretien consacrées à L'Or d'Alexandre et à mon parcours d'écrivain.

Vive la Belgique ! où les journalistes lisent les livres, et où ils en traitent s'ils les ont aimés, sans se soucier si vous êtes fils de, si vous appartenez à telle ou telle Nomenklatura, si votre éditeur est de ceux dont on peut attendre des retours d'ascenseur.

Laurent Dehossay a donc lu L'Or d'Alexandre, et m'a interrogé sur sa genèse. Toujours pertinent, comme dans notre première rencontre radiophonique. Parce qu'il a compris que ce livre n'était pas la prolongation du précédent que par la forme de thriller, qu'il l'était parce que si La Quatrième Révélation est né de ma révolte contre le silence médiatique qui tue une seconde fois les victimes de l'homophobie, cette tare chrétienne qui justifie, aujourd'hui encore, les pires barbaries des pires brutes, L'Or d'Alexandre, lui, vient du besoin de me colleter avec une autre discrimination. Celle qui naît du regard ou des paroles, de l'indifférence ou du refus de voir. Parce que c'est en faisant la connaissance d'un lecteur handicapé, parce que c'est lorsque Michel Robert est devenu un ami que m'est devenu indispensable d'écrire sur ce qu'il vivait. Sans pathos ni apitoiement, d'une façon... tonique, moi, le valide, humoristique, vraie - grâce à Michel et à la manière dont il a répondu à toutes mes questions, à ses réponses qui m'ont permis de bâtir mon Philippe. Philippe qui n'a rien à voir avec lui et qui, pourtant, lui doit tout.

Lorsque j'ai envoyé mon manuscrit à Michel, avant de l'envoyer à mon éditeur, j'ai connu quelques jours de profonde angoisse. Et s'il me disait que j'avais mis à côté de la plaque ? Jamais, bien sûr, je n'aurais publié ce livre. Deux ans de demi de ma vie et de travail... C'est aussi la raison pour laquelle l'article de Yanous est pour moi si important. Que j'en suis si... fier ?

Laurent Dehossay m'a aussi fait parler de ma vie, de ce qui m'a fait ce que je suis, arriver là où j'en suis. Je n'ai pas trop l'habitude de regarder mon passé, de m'auto-scruter. Mais en six mois, après que Régine (l'infatigable bâtisseuse de ce site) m'a invité à écrire là-dessus et à replonger dans mes photos d'enfance afin d'illustrer la partie biographique de ce site, Laurent m'en a fait parler. C'est encore différent. Je n'ai jamais été psychanalysé, mais il doit y avoir un rapport. Ce fut parfois troublant. J'espère surtout que ce sera intéressant pour les auditeurs.

Merci à Laurent Dehossay en tout cas.

Après sa diffusion en hertzien (lundi et mardi), les deux émissions seront en principe écoutables sur votre ordi (pendant une semaine, je crois) à l'adresse suivante : en cliquant dans la liste sur le titre de l'émission : "Tout le monde a une histoire".

Ensuite, mes deux prochaines étapes seront alsaciennes :

- le vendredi 25 avril à 17h30

- puis les samedi 26 et dimanche 27

jeudi 10 avril 2008

Vous avez cru au « Grenelle de l’environnement » ?

Vous avez eu l’invasion des pubs pour les bonus qui vous permettent d’enrichir des fabricants de bagnoles poussant leurs salariés au suicide (vive l’autorégulation du marché ! à bas le droit du travail qui impose tant de contraintes insupportables à l’économie). Des bagnoles mais des diesels ! respirez la différence ! Elles produisent moins de CO2 même si elles empoisonnent beaucoup plus l’air des particules qui vous encrassent les poumons. Ah ben oui, forcément, si on va chercher la petite bête : quand on vous dit que je ne suis jamais content !

Vous avez cru pouvoir refuser d’avaler la Constitution européenne en potion au terme du débat le plus démocratique des dernières décennies, au terme d’un vrai débat citoyen à l’intérieur de chaque famille, entre amis, au terme d’un débat pendant lequel la vente des livres sur l’Europe a explosé, témoignant de la volonté des citoyens de s’informer avant de décider ?

On vous l’a administré en lavement, par la grâce de parlementaires de droite qui n’en ont rien à foutre ni de votre avis ni de la démocratie, et par la lâcheté de députés de gauche qui avaient le pouvoir de rendre la parole au peuple mais qui ont préféré le réduire au silence pour masquer leurs divisions.

Vous avez cru que, même si vous votiez pour la Constitution européenne, vous auriez la possibilité de dire que la Turquie, par sa situation, son histoire, sa culture, son absence de toute tradition démocratique (Kemal n’a jamais été qu’un dictateur admirateur de Lénine et de Mussolini, utilisant les méthodes d’Hitler dans les Sudètes pour obtenir le sandjak d’Alexandrette, dont la « laïcité » n’est qu’une forme de despotisme et n’a rien à voir avec la nôtre), ses intérêts géostratégiques, son alliance privilégiée avec les États Unis, le caractère à la fois mafieux et policier de son État, l’usage de la torture et de la détention arbitraire dans des conditions ignobles (il est vrai qu’entre Bush, Dati et l’état des prisons françaises…), la place grandissante qu’y joue la religion, n’a rien à faire dans cette Europe-là. On a même voté un amendement à notre Constitution pour vous faire croire que vous auriez votre mot à dire, qu’on ne pourrait pas faire entrer la Turquie en douce sans vous consulter. Et puis Sarko ne vous avait-il pas assuré que dès son arrivée, il mettrait fin aux négociations d’adhésion ?

Sarko n’a mis fin à rien du tout, il laisse les négociations se dérouler tranquillement et, en prime, sa réforme constitutionnelle abrogera l’amendement en question, permettant ensuite au Parlement de voter, seul, en se battant l'oeil avec une queue de sardine de votre avis, l’admission de la Turquie dans l’Europe.

Cocu ? vous avez dit cocu ?

C’est ce qu’a dû se dire aussi Mme Kosciusko-Morizet quand on lui a demandé d’aller à Canossa après lui avoir imposé de ravaler toutes ses promesses et toutes ses ambitions, tout ce qu’avait « décidé » dans l’allégresse générale, le fameux Grenelle qui ne fut qu’un bal médiatique de dupes, et de laisser Monsanto empoisonner en paix, de prévoir même qu’on foutrait bien en taule, et taxerait d’importance, tous les dangereux criminels qui fauchent ces saloperies.

Dans ce pays, en Europe, les peuples ne veulent pas des plantes transgéniques. On ne sait rien sur les effets de leur consommation à long terme, on sait tout sur le fait qu’on ne pourra plus s’en débarrasser. Jamais. Que de place en place, c’est toute l’agriculture qui nourrit les hommes qui sera contaminée. On sait qu’elles permettent à des multinationales de ranger les paysans dans leur complète dépendance, qu’elles rendent chimérique la subsistance d’une agriculture bio à laquelle de plus en plus d’entre nous aspirent. Mais les peuples n’ont rien à dire, le capital des semenciers, la FNSEA et une poignée de parlementaires ont déjà décidé pour eux.

Il y a 15000 lobbyistes à Bruxelles, un pour sept députés européens. Je ne sais pas combien hantent les antichambres du Palais Bourbon et de celui du Luxembourg. Il semble en tout cas qu’ils ne manquent pas de « moyens » (ah les voyages d’études, les ouiquendes de travail au soleil, les tables des grands restos, les petits services entre amis, les campagnes à financer…) pour faire valoir leurs arguments. Jusqu’à faire coffrer tous ceux qui refusent de bouffer leur merde ? Il doit être difficile, en prison, d’obtenir un menu sans OGM.

On savait déjà que Melles Yade et Amara, M. Hirsch et quelques autres ne servaient à rien qu’à la décoration. En français, on appelle ça des alibis qui causent juste pour qu’on les démente ou qu’on fasse savoir qu’on a pas un sou (forcément, on les a tous donnés aux gens qui prêtent leurs avions et autres yachts au président-qui-a-changé), pour leurs vagues projets de charitable colmatage des désastres produits sur les humbles par l’actuelle politique, de la hausse du gaz à la baisse des revenus du travail et des retraites, ou à la taxation des malades chroniques, autrement appelée franchises médicales.

Eh bien Mme Kosciusko-Morizet vient de réaliser qu’elle n’est elle aussi qu’un alibi et qu’elle doit avaler les couleuvres en fermant son clapet. C’est rude. On aurait presque pitié d’elle. Ou Honte. Qu’après une pareille gifle, une semblable humiliation, elle n’ait pas au moins la dignité de démissionner. Ah ! les ors de la République, les privilèges et les prébendes… c’est dur d’y renoncer quand on y a goûté. Demandez à Kouchner !

Allez ! juste encore une, pour la route, Trichet, l’irresponsable de Francfort, appelle à la modération salariale contre l’inflation. Ben voyons ! Et si une fois, juste une, il appelait à la modération de la spéculation qui est responsable d’au moins 80 % de la hausse du pétrole et des matières premières.

Vous aviez cru aussi que Sarkozy était contre l’euro fort et la cécité de la Banque centrale européenne. Ah oui, vraiment ? mais alors que n’a-t-il inscrit la modification de ses statuts et de ses missions à l’agenda de la négociation de son traité « simplifié » ? Que n’a-t-il dit haut et fort à ses partenaires que la France ne signerait aucun nouveau traité européen sans avoir modifié ces points fondamentaux qui condamnent aujourd’hui de plus en plus d’entre nous qui n’appartiennent pas aux Nomenklaturas, à crever la gueule ouverte ?

mardi 8 avril 2008

Sakotan, Sarkonnerie

Sarkozy n’a sans doute jamais été gaulliste ; Sarkozy c’est la vieille et éternelle droite réactionnaire et cléricale qui n’apprend ni ne comprend jamais rien. Celle qui en 1792 est allée chercher les monarques coalisés pour sauver le Trône et l’Autel, celle qui en 1871 profita de la divine aubaine de la victoire prussienne pour écraser le réflexe patriotique qui engendrait la révolte populaire, celle qui pensa « plutôt Hitler que Blum » et qui trouva son héros dans Pétain, celle qui se rua, dans les années 50, à la sujétion de rechange qu’offraient les Etats-Unis d’Amérique.

Sarkozy, c’est la vieille droite rance qui ne veut pas seulement sa revanche sur 68 mais sur la décolonisation, la Séparation de l’Église et de l’État et la Révolution de 1789 ; sur une France républicaine qui a un message original à délivrer au monde. Sarkozy ce n’est pas la rupture c’est la régression ; c’est le refus de penser la complexité du monde, c’est le retour aux vieux réflexes autoritaires et xénophobes à l’intérieur, à la passion de la dépendance par rapport à un Patron extérieur.

Les commémorations sarkoziennes de De Gaulle et de la Résistance sont des leurres. Il y dit le contraire que ce qu’il fait – sinon de ce qu’il pense (ce que je suis incapable de savoir). Les lois Dati qui ressuscitent la détention administrative d’un homme pour ce qu’il est censé être, dans son essence intemporelle et inamendable (rappelons-nous de l’entretien du candidat avec Onfray : les pédophiles et les suicidaires ne peuvent l’être que génétiquement), non pour ce qu’il a fait, les lois Dati qui ont tenté de s’asseoir sur le principe de non-rétroactivité de la loi pénale sont en prise direct sur l’héritage législatif de Vichy. C’est la première fois depuis Vichy qu’un Gouvernement français fixe des quotas d’êtres humains à arrêter et expulser. La taxation des malades chroniques, autrement appelée franchise médicale, comme le démantèlement en cours des retraites et du droit du travail, la généralisation des travailleurs pauvres et des retraités poussés chaque jour davantage vers l’indigence est le démontage systématique du programme social du Conseil National de la Résistance.

Car si la Résistance fut d’abord, pour beaucoup, un réflexe contre l’inacceptable – une occupation étrangère –, elle fut aussi une réflexion sur ce que devait être une société moderne. Celle-là même que la IVe République puis de Gaulle ont construit, que tous les gouvernements jusqu’au précédent se sont donné pour mission de défendre – bien ou mal c’est une autre histoire ; celle que ce gouvernement-ci a entrepris de démanteler, pour renvoyer les humbles au plus de précarité possible qui les laissera les plus démunis et donc les plus corvéables possibles, devant les « frères » du président, cette classe de plus en plus réduite et de plus en plus riche qui vide chaque jour davantage la démocratie de tout véritable contenu.

Mais la destruction de l’héritage de la Résistance et de De Gaulle ne pouvait s’arrêter là. Elle ne pouvait qu’aller de pair avec la destruction, dans l’ordre extérieur, de l’idée d’une France indépendante à la parole et aux mains libres, qui porte un message qui lui est propre et ne s’engage que dans les guerres qui sont les siennes.

À leur manière, Pompidou, Mitterrand, Villepin… et même Giscard – le vrai prédécesseur de Sarkozy en tant de matières, notamment en matière d’abaissement national – ont porté ce message-là.

Mais Sarkozy, lui, ne supporte pas cette idée d’indépendance. Pour lui, il y a un camp occidental et le reste du monde. Les Bons et les méchants (comme il y a les gens normaux et les dangereux qu’il faut enfermer). Le rôle de la France n’est pas d’être fidèle à ses valeurs et à ses héritages, de tenir son rang, de défendre la vision d’un monde multipolaire, de se déterminer en fonction de ses intérêts, d’offrir un modèle alternatif à ceux qui pensent que la défense des valeurs qui fondent notre vision du droit et de la société internationaux ne signifie pas un alignement inconditionnel sur les intérêts américains.

Pour Sarkozy, être allié c’est être aligné. C’est faire où les Américains vous disent de faire. Pour Sarkozy, il fallait aller en Irak, il faut envoyer plus de soldats français en Afghanistan. Pourquoi ? Personne ne le sait. La politique de la canonnière, partout, toujours, conduit à des échecs. Les protectorats militaires finissent toujours dans le sang. Renverser les talibans étaient légitime, il fallait – avant – penser ce qu’on ferait après, mettre – ensuite – le paquet pour développer, équiper, donner des revenus, acheter la paix et un nouvel équilibre social, dégager un vrai consensus politique, pas soutenir coûte que coûte un homme sans doute élégant (au fait, une question me taraude : a-t-il le même fournisseur de châles que Mme Alliot-Marie ?), mais coupé des réalités et sans doute aussi corrompu que privé de tout moyen d’action.

Pour Sarkozy, il faut aujourd’hui mettre fin à l’aberration gaullienne, faire rentrer la France dans le rang. Cela ne pouvait pas même attendre une nouvelle administration. Non ! il fallait faire l’annonce de ce cadeau-là au président américain le plus démonétisé, le plus universellement haï depuis longtemps, au président dont la politique, en échec sur tous les fronts, est déjà condamnée par l’histoire comme par ses concitoyens. Un peu comme il était indispensable de dérouler le tapis rouge devant Kadhafi…

Et contre quelle contrepartie ? Un feu vert américain pour une chimérique Europe de la défense. Chimérique ? La défense est l’instrument d’une politique et d’une diplomatie. Mais l’organe ne crée pas la fonction. Se doter d’un ministre des Affaires étrangères européen ne créera pas une politique étrangère européenne : c’est toute l’absurdité de la construction européenne actuelle ! On crée des institutions, des superstructures, sans savoir ce qu’elles devront défendre. Comme si le calamiteux traité de Maastricht et l’absurde expérience de la Banque centrale ne suffisaient pas. Comme si, avant de créer une monnaie et un aréopage de banquiers tout-puissant qui, tels des médecins de Molière, asphyxient l’économie pour nous permettre de crever en bonne santé monétaire, il n’avait pas fallu dégager une politique économique et fiscale commune.

Chimérique parce que nous sommes les seuls, en Europe, à prétendre vouloir une Europe de la défense, parce que la manière même dont a été réalisé l’élargissement, sans réflexion, sans projet politique, condamne toute Europe puissance, toute Europe indépendante, et donc toute Europe de la défense.

Chimérique parce que l’OTAN est, de fait, pour tous les Européens sauf nous, la seule Europe de la défense qu’ils veulent. Parce qu’à partir du moment où cette alliance, qui aurait dû cesser d’exister en 1990 puisqu’elle n’avait plus d’objet, a persisté dans l’être, s’est développée par métastases, renforçant le poids de ceux qui, en Europe ne veulent pas d’autre Europe de la défense qu’elle, continuer de parler d’une Europe de la défense à côté de l’OTAN est absurde et relève soit de l’inconscience soit du double langage.

Cette contrepartie est donc une fausse contrepartie, destinée à servir de cache-sexe, aux yeux de l’opinion française, à la réintégration pleine et entière de la France dans l’OTAN, à sa normalisation, à refermer la funeste parenthèse ouverte par de Gaulle, à la refaire marcher définitivement et automatiquement au pas et sous commandement américain – quelles que soit les concessions en trompe l’œil (un commandement ou l’autre) qui lui seront ou nous accordées.

La calamiteuse diplomatie du couple Sarkozy-Kouchner est un mélange de maladresses, d’erreurs de jugement, de confusion des genres, d’amateurisme et de vulgarité. A l'extérieur, elle fait rire souvent ; elle sème aussi la consternation chez tous ceux, dans le monde, pour qui la France représentait une alternative, la défense des valeurs occidentales et le respect des identités culturelles, le refus de l’alignement sur le cynisme de la puissance américaine.

Elle relève surtout d’une illusion, la même que celle qui a conduit les collaborateurs entre 40 et 44 à adhérer d’enthousiasme à l’Ordre nouveau, à revendiquer que des soldats français puissent combattre sous uniformes nazis ; celle des atlantistes ensuite, Blair (que Sarkozy veut logiquement mettre à la tête de l'Europe) ou Aznar récemment : le seul moyen d’action est d’« influencer » le maître, et pour avoir une chance d'être « écouté » de lui, il faut d'abord gagner ses bontés par une totale soumission. Mais les nazis ont toujours méprisé les collabos, les Américains n’ont jamais infléchi la moindre de leur décision sur les conseils de ceux qui s’étaient mis d’eux-mêmes en position de dociles serviteurs.

C’est l’exact contraire de la philosophie qui, en 1966, conduisit le général de Gaulle à dégager la France du commandement intégré de l’OTAN : « L’Europe, dont la stratégie est, dans l’OTAN, celle de l’Amérique, serait automatiquement impliquée » dans des conflits qu’elle n’aurait pas voulus, et qui pourraient ne pas correspondre à la défense de ses intérêts. « La volonté qu’à la France de disposer d’elle-même, volonté sans laquelle elle cesserait bientôt de croire en son propre rôle et de pouvoir être utile aux autres, est incompatible avec une organisation de défense où elle se trouve subordonnée. » (Conférence de presse du 21 février 1966).

mercredi 2 avril 2008

Aris, poulet au vinaigre, polar, État d’Esprit, gras double, korê, morgon et Poussin

Mon ouiquende fut lyonnais. D’où le poulet au vinaigre (celui de Joseph qui officie mieux que beaucoup de pros dans les cuisines d’Aris : son dessert aussi valait le détour !), le pot de morgon et le gras double du Café des Fédérations (un vrai bouchon : on a commencé à la salade de pied de veau et au saucisson de Lyon, terminé à la cervelle de canut) que j’ai partagé avec Régine Foucault, une grande amoureuse de la littérature devant l'Éternel et l’infatigable bâtisseuse de ce site qui me permet de vous parler. Combien de mercis dois-je à Régine ?! et combien d’autres mâchons à partager pour lui prouver toute ma gratitude !

A Lyon, j’y allais pour le Quai du polar, présenter mon Or à l’association Aris puis le signer à la librairie État d’Esprit, ce lieu rare, en France, où les lesbiennes et leurs frères pédés peuvent trouver tout ce qu’ils trouvent dans la meilleure librairie et tout ce qu’ils n’y trouvent pas. Un lieu rare ; comme Les Mots à la bouche, Bluebook, ou Violette and Co à Paris, comme La Mauvaise Réputation à Bordeaux et Les Mots pour le dire à Marseille. De ces lieux rares, nés de l’acharnement de ceux qui les font vivre à nous donner un espace de liberté supplémentaire et qui marquent dans la ville le chemin que nous avons parcouru – dont nous avons, en outre, intérêt à ce qu’ils ne disparaissent pas, indice que, alors, nous serions en train de faire ce chemin-là aussi à l’envers. Aussi. Comme nous faisons aujourd’hui à l’envers le chemin qui mène de l’État de droit et de la Sécurité sociale voulue par le Conseil national de la Résistance (où l’on retrouve Lyon, capitale d’icelle) aux lois scélérates qui ressuscite la détention administrative ou impose l’ignoble taxation des malades chroniques par la répugnante franchise médicale.

Rien n’est jamais acquis ! Prenons garde et faisons en sorte, chacun, que ces lieux-là puissent continuer à vivre, parce qu’ils font partie de notre liberté et que rien n’est plus fragile que la liberté – surtout quand on croit qu’elle va de soi, qu’il n’est pas nécessaire de la défendre.

Bref, à État d’Esprit, j’ai battu, comme chez Bluebook et au salon du livre de Paris, mon record de signatures de La Quatrième Révélation. Un romancier, en tout cas moi, écrit pour être lu. Et l’angoisse quand on sort un nouveau roman, surtout après un succès, comme ce fut le cas de ma Révélation qui m’a valu tant de témoignages, de lettres… de reproches d’avoir osé tuer mon Julien, c’est de savoir si l’on a été à la hauteur des attentes de ses lecteurs, de savoir si l’on va pouvoir en conquérir d’autres. Pour l’instant le test est réussi !

Si j’ai choisi de travailler la veine du polar, du thriller, c’est que je crois que, par ce moyen littéraire, par le suspense, je peux faire partager mon univers, mes passions, mes obsessions à des lecteurs qui ne viendraient pas naturellement vers un roman « normal », dont les héros, au surplus, sont pédés. Ces trois bonnes signatures sont donc d’excellent augure. Celui que j’ai désormais un lectorat qui me suit, m’accompagne, m’épaule, qui me pousse en avant – même si le doute est toujours là qui ronge et interroge.

Parmi les lecteurs dont j’attends à présent, avec angoisse, le verdict, les amis de longtemps et des lecteurs naguère anonymes qui le sont devenus, Michel Robert et Régine Foucault, Martial et Pierre, Chantal, Éric, Sylvie et Michèle, Laurent, Françoise, Bruno et Patrick, Mélanie, Jean-Louis et d’autres, figure désormais Alain Bernoud, ancien président d’Aris, et qui est une des âmes de cette association qui m’a reçu pour la deuxième fois vendredi soir. J’ai connu Alain il y a deux ans, lorsqu’il m’a invité à présenter ma Quatrième Révélation chez Aris. Sur le conseil d’Isabelle, qui fut l’âme d’État d’Esprit pendant des années, il m’avait découvert dans Les Ombres du levant. Puis il avait tout lu de moi dans la foulée, en ayant une faiblesse (comme moi) pour mon Château du silence. Alain fait un métier dur, levé tous les matins à 5h00 (un cauchemar pour moi), à qui la lecture est vitale. Alain est, pour un écrivain, de ces lecteurs inestimables qui vous dévorent et vous relisent ; qui vous parlent ensuite de leur lecture – avec intelligence et sensibilité, nuance et passion. Où l’on apprend comment l’on a réussi à toucher juste, volontairement ou pas. Soulagé, cette fois encore, parce que son enthousiasme est intact.

Une bonne critique fait plaisir, deux excellentes, comme celles de Laurent Lejard et Antoine Dole, parues ce ouiquende sur Yanous (le plus grand site français dédié aux handicapés) et dans le gratuit gay de qualité ''Sensitif'', sont revigorantes. Les impressions de lecture d’Alain et de ses alter ego sont inestimables.

C’est donc grâce à Alain que le cercle de mes lecteurs lyonnais s’est agrandi : je le remercie comme je remercie tous ceux qui étaient là pour m’accueillir vendredi soir, pour m’écouter et me dire comment ils avaient reçu mon précédent roman (une adhérente de David et Jonathan que, à présent, elle ne lisait plus saint Paul sans penser à ma Révélation !), pour partager un dîner aussi délicieux (re-bravo Joseph !) que chaleureux. Merci Sabine, merci Jean-Charles, Christophe et tous les autres.

J’oubliais ! entre le gras double et État d’Esprit, j’ai fait un raid au Musée des Beaux arts : très jolie collection de bronzes et de céramiques grecs, qui m’aura permis de faire mes dévotions à quelques Athéna, Hermès (ci-dessus), Apollon, Dionysos, ma tétrade tutélaire – sans oublier les autres dieux de l’Olympe évidemment ; et une superbe korê de l’Acropole, donc offerte à Athéna, à la somptueuse chevelure et… aux curieux biscotos de débardeur (ci-dessous).

Et puis comme j’ai inventé un Poussin dans L’Or d’Alexandre, je suis allé voir (trop vite) l’expo organisée à l’occasion de l’achat de sa Fuite en Égypte (le premier ci-dessous). Poussin est un grand peintre et l’expo vaut le détour ; mais en ce qui me concerne c’est une autre Fuite qui m’a scotché, celle de Philippe de Champaigne (Musée d'art et d'archéologie de Senlis, le second ci-dessous) et l’incroyable bleu du manteau de sa Vierge.

Enfin, lundi, j’ai fait un aller et retour vers une ville que j’aime de plus en plus. Bruxelles. Vive les Belges ! dont la critique littéraire n’est pas sourde et aveugle à tout ce qui se fait hors d’un certain « Milieu », qui s’intéresse à d’autres livres que ceux des journaliste et des fils de, à d’autres choses que les produits éditoriaux d’éditeurs qui furent parfois grands et qui ne sont souvent plus que gros, dont la critique n’est pas organisée en Nomenklatura se repassant à l’envi la casse et le séné, qui prend le temps d’ouvrir et même de lire les livres qu’on leur adresse : naïfs de Belges !

En France, aujourd’hui, tout est bloqué par ces Nomenkalturas qui, partout, dans tous les milieux, monopolisent le pouvoir, verrouillent et cadenassent pour empêcher toute mobilité, toute intrusion dans leur chasse gardée. La France (et sa littérature) crève de ses Nomenklaturas, comme elle crevait, dans les années 1780, de la réaction aristocratique.

Pendant ce temps-là, les Belges ont reconnu le mariage gay, légalisé le suicide assisté et la consommation du cannabis, ils ont des facultés dans lesquels les étudiants français se bousculent parce qu’ils n’ont pas de place en France, comme les gens du Nord vont confier leurs parents à des maisons de retraite belges parce que nos Nomenklaturistes n’ont su ni prévoir ni organiser…

Bref, lundi j’ai enregistré avec Laurent Dehossay deux heures d’entretien sur L’Or et sur mon parcours, qui seront diffusées dans l’émission « Tout le Monde a une histoire » les 21 et 22 avril prochains, de 16h00 à 17h00 sur La Première de la RTBF : merci Laurent… et vive les Belges !