Déjà hier, notre très catholique président (ça ne doit pas être facile tous les jours pour ce grand catholique, que l'Église qu’il aime tant et qui définit mieux que les instits le bien et le mal, d'être condamné sans appel et interdit de Sainte Table pour ses deux divorces !) m’a fait grimper au lustre avec sa laïcité, ouverte, ou rénovée, ou modernisée, on ne sait plus. Il n’y a qu’une sorte de laïcité : celle qui refoule la religion hors de la cité, celle qui lui interdit d’interférer dans l’État ; celle qui la tient étroitement cantonnée au domaine du privé. Et cette laïcité-là, depuis que Jack Lang a permis aux financements de l’enseignement confessionnel d’exploser, on l’a déjà bien trop ouverte, rénovée, modernisée… on l’a surtout bien trop violée.

Et pourtant ce matin l’inénarrable et pontifiant pontife a battu notre Sarko national dans les grandes largeurs ! Au passage, il faudrait exiger une bonne fois des médias qu’ils arrêtent de se comporter à l’égard de ce type, qui n’est ni saint ni père, comme s’il était le directeur de conscience des Français : il y avait deux cent mille Français ce matin aux Invalides, et alors ? est-ce parce que le PC est toujours capable d’organiser la Fête de l’Huma que son existence signifie encore quelque chose ?

Mais revenons à Benoît et à cette première épître aux Corinthiens du sinistre Paul de Tarse dont il fit ce jour d'hui le laborieux commentaire de texte devant une foule ébaubie. Les lecteurs de La Quatrième Révélation savent ce que je pense de Paul : il est le fondateur de tous les totalitarismes, parce qu’il a fondé le premier. Dans l’épître en question (6, 10), précision destinée à tous ces pédés qui se veulent ou se croient chrétiens, notre zélateur du Dieu d’amour et de miséricorde, dont toutes les épîtres transpirent la haine et suent l’anathème, nous informe, entre autres joyeusetés, que « ceux qui se livrent à la débauche, adorent les idoles, pratiquent l’adultère, les mous efféminés et les mâles qui se vautrent avec des mâles dans le même lit, les voleurs, les avaricieux, les ivrognes, ceux qui blasphèment et font preuve de cupidité, aucun de ceux-là n’héritera du royaume de Dieu », avant de préciser, dans celle aux Romains (I, 26-32) que lesdits mous efféminés et mâles se vautrant etc., « méritent la mort ». Dieu d’amour et de miséricorde…

Bref, ce soi-disant grand intellectuel qu’est Benoît XVI n’en avait pas après ces mâles-là aujourd’hui, mais après les idoles, ce qui, on en conviendra, est d’une actualité brûlante.

Ironie facile diront certains, car l’exégèse c’est justement de nous dire ce que Paul n’a pas dit et de cacher ce qu’il a dit mais qui gêne parce que c’est monstrueux, en faisant croire que les idoles qu’ils dénoncent en cachent d'autres, que ses prurits d'intolérance n'en sont pas et que ses élucubrations émises devant des païens généralement confondus par tant de bêtise, par un type persuadé que le Jugement dernier est pour demain ont encore le moindre sens dans le monde d'aujourd'hui. Soit. Mais alors quelle est cette actualité ? Écoutons Benoît :

« L’argent, la soif de l’avoir, du pouvoir et même du savoir n’ont-ils pas détourné l’homme de sa Fin véritable, de sa propre Vérité ? »

Autrement dit, soyez cons et ignares et vous serez sauvés. Bien sûr, tous les médias vont relever que la pape a condamné le capitalisme sauvage – l’argent et la soif de l’avoir –, aucun ne relèvera l’ironie qu’il y a à condamner la soif du pouvoir devant le très catholique Sarko.

Mais la soif du savoir qui détourne l’homme de sa Fin véritable et de la Vérité ?

On savait déjà que l’arbre de la Connaissance est à l’origine de tous les malheurs de l’humanité. On savait aussi qu’heureux les simples d’esprit… et qu’il vaut mieux chanter « des psaumes, des hymnes, des chants inspirés » (Paul, épître aux Colossiens, 3, 16-17) que se « laisser ravir par la philosophie, vaine supercherie » (Idem, 2,8), qu’il vaut donc mieux prier et croire que chercher à savoir. On savait encore que la très chrétienne Sarah Palin (elle me plaît beaucoup, celle-là aussi ! vous allez voir qu'on va regretter Bush de la même façon que Sarko est parvenu à nous faire regretter Chirac...) est une adepte du créationnisme, tellement en vogue chez les plus réactionnaires protestants comme chez les islamistes turcs promis à une entrée dans l’Union européenne, mais dont la forme cultivée, le dessein intelligent, fait sûrement son chemin dans l’Église catholique, sous la houlette de l’archevêque de Vienne, le cardinal Schönborn, et avec la bénédiction du grand intellectuel Benoît.

Maintenant on est fixé : le savoir c’est mal, et c’est Benoît qui le dit. Ça valait le coup de le recevoir en grande pompe et de réunir autour de lui deux cent mille ravis de la crèche, non ?

Bon allez, j’arrête là. Je vais encore me faire engueuler par mon homme qui trouve mes billets trop longs, qui voudrait que j’écrive plus court. J'ai bien essayé de conjurer son ire en coupant ce billet en deux, mais je sais qu'il ne sera pas dupe !

PS : message personnel à Tom Cruise : pardon de ne vous avoir pas répondu, mais je n’ai découvert qu’hier votre commentaire sur un vieux message. Je tâcherai donc de faire un court billet (pour contenter Frédéric) afin d’expliquer pourquoi, à mon avis, le quinquennat sec a totalement dénaturé les institutions de la Ve République.

PPS : je conseille à tous mes lecteurs pédés la lecture du premier ouvrage d’un très bon ami, le professeur gallois A.S. Steelcock : son ''Larry Poppers'' est franchement impayable ! Voir aussi son premier entretien accordé aux Niçois de l'association Polychromes.

PPPS : pour Fabio, dont je viens également de découvrir le commentaire sur un autre message ancien, merci de ce que vous me dites de votre lecture du Plongeon ; quant aux biscuits roses... il y a sans doute des traditions diverses : Frédéric avec qui je vis depuis bientôt 25 ans est Rémois lui aussi. Et la première fois que j'ai été reçu dans sa famille, à Reims... on m'a fait tremper mon biscuit rose dans mon champagne. Voilà, je ne peux en dire plus sur le fait que cette pratique soit ou non hétérodoxe, le fait est que les choses se passèrent ainsi, que les deux vont bien ensemble et que depuis, dès que je me trouve en présence d'un biscuit rose et d'une flûte de champagne, à tort ou à raison, je me fais ce petit plaisir... de tremper l'un dans l'autre.