Eh bien voilà, cher lecteur de ces humeurs, le prix Handi-Livres c'est raté ! Mais dans des conditions qui me "ravissent". Non à cause du résultat, bien sûr, mais parce qu'elles viennent à un tel point confirmer ce que j'écris sur le système des prix "à la française" dans Comment je n'ai pas eu le Goncourt que c'en est... drôle.

J'avais fini presque par y croire un peu à cause de la conviction de Michel Robert et Gérard Coudougnan. Mais non, le système est toujours le plus fort ! Comme à l'Epad.

Pour le reste, les discussions que j'ai eues au buffet (interdit aux fauteuils ! par une volée d'escaliers sans même un plan incliné !! dans une cérémonie organisée par une mutuelle de handis, pour des livres traitant de handicap !!! ça c'est la France, la vraie...) m'ont assuré que mes défenseurs ont perdu à peu de chose et qu'ils étaient majoritaires parmi les membres handicapés du jury : on se console comme on peut !

Allez, on tourne la page ! Non sans porter à votre connaissance, cher lecteur, le courriel que je viens d'adresser aux organisateurs de ce prix.

"Merci, chère Madame, de m'avoir donné l'ocasion hier de participer à cette charmante soirée et de discuter ainsi avec des membres du jury qui ont défendu, apparemment avec fougue, mon Or d'Alexandre, témoignant ainsi à mes yeux, une fois de plus, combien la manière dont ce livre traite du handicap correspond à celle qu'attendent nombre de lecteurs handicapés.

J'ai notamment été ravi d'entendre de la bouche d'un autre membre du jury, publiquement, au pupitre, lors de la remise du prix "roman", que la mutuelle organisatrice du prix ou (je ne sais plus) l'association représentée par ce juré était liée par un partenariat de vingt ans à l'éditeur du roman couronné ! On est bien là, une fois encore, au coeur du système des prix "à la française" que je décris dans mon dernier roman tout juste sorti.

C'est d'autant plus drôle que j'écrivais, hier, dans mon blog, ces lignes :"Bon, on a beau se dire qu'on n'a aucune chance, que de toute façon il y a dans la course un livre de chez Actes Sud, éditeur bien plus "légitime" pour un jury qu'un petit éditeur pédé de province, on a beau se dire qu'il ne faut rien espérer pour n'être pas déçu...", sans espérer non plus un pareil élan de sincérité d'un membre du jury !

Merci donc, d'avoir ainsi, confirmé mes analyses, même si je crois bien, ailleurs, on pourrait qualifier ce genre de situation de "conflit d'intérêt". Ceci sans mettre en doute, naturellement, la qualité littéraire du livre primé...

J'espère que vous pourrez transmettre ces quelques réflexions aux organisateurs du prix, ainsi que la suggestion suivante : pourquoi ne pas limiter l'année prochaine, les candidatures à icelui aux éditeurs partenaires de votre mutuelle ou des associations présentes dans votre jury ? cela éviterait à de petits éditeurs qui sont toujours financièrement sur le fil, comme vous l'a écrit celui du livre jeunesse distingué, et qui ne combattent donc pas à armes égales, de dépenser quelques précieux exemplaires.

A ce propos et dans ces conditions, je vous serais très reconnaissant de bien vouloir faire déposer à mon domicile, dès que possible, l'exemplaire de L'Or d'Alexandre que vous y avez fait prendre la semaine dernière au cas, éminemment improbable, nous le savons désormais, où il l'aurait emporté, afin de le remettre en cadeau au président... ce qui ne fut pas le cas.

Une suggestion encore : pour une mutuelle de personnes handicapées, il serait peut-être judicieux à l'avenir de choisir un lieu, pour la remise d'un prix Handi-Livres, où les fauteuils ne soient pas bloqués en haut d'un escalier, à bonne distance du buffet. Quand on sait la difficulté qu'il y a, dans le monde des valides, à faire passer dans les faits les obligations légales d'accessibilité (un de mes lecteurs handis devenus un ami a ainsi dû se pacser dans la rue, faute d'une rampe lui permettant d'accéder au tribunal...), il me paraît pour le moins étrange que dans une cérémonie conçue autour du handicap, celles-ci soient ainsi ignorées !

Avec l'assurance de mes sentiments choisis.

Olivier Delorme"