Et voilà que Benoît XVI nous ressert une fois de plus le vieux mensonge inventé en 1749 par Benoît XIV : le Colisée comme symbole du martyre des chrétiens par l'Empire romain (que je relève déjà dans Le Plongeon), et de déplorer, en oubliant les innombrables victimes du christianisme, la multiplication des Colisées.

Je suis un partisan intransigeant de la liberté de conscience, celle de croire comme de ne pas croire. Mais en parlant ainsi le pape ment, il se livre à une pure et simple opération de propagande, car il sait qu'il ment : jamais aucun chrétien n'a été mis à mort dans le Colisée.

Ceux qui l'ont été à Rome l'ont été ailleurs - jamais ici. Ils ne l'ont d'ailleurs jamais été à raison de leur foi, mais parce qu'ils mettaient en danger l'Empire en refusant de sacrifier à ses dieux. Quand ils ont été persécutés, dans l'Empire romain, toujours durant des périodes de crise politique, très courtes, les chrétiens l'ont été d'ailleurs le plus souvent spontanément par la "base", en raison de leur refus des règles sociales (non de leurs croyances ou de leurs rites), les populations voyant dans cette attitude une subversion qui mettait en danger l'équilibre de la société et de l'État. Le problème n'est donc pas, dans cet univers intellectuel-là, la religion des chrétiens, c'est leur entêtement à ne pas respecter les rites qui sont là pour assurer la sauvegarde de tous, de prétendre que LEUR Dieu est le SEUL VRAI Dieu. L'intolérance n'est pas du côté des Romains, elle est du leur ; c'est leur intolérance qui les fait persécuter, non pour des raisons de conscience qui sont totalement étrangères au monde polythéiste de l'Antiquité classique qui accueille les nouveaux dieux sans distinction. L'intolérance et la persécution pour raison de conscience apparaissent AVEC le monothéisme : c'est parce que MON Dieu est le seul vrai que je suis habilité à persécuter qui ne le reconnaît pas - puisqu'il est dans l'Erreur.

Quant à la persécution qui vient du pouvoir, elle ne s'exerce jamais que sur des périodes extrêmement courtes, rarement plus d'un an à chaque fois, soit au total disons une vingtaine d'années (fractionnées en une dizaine de séquences) entre 64 et 305, fin de la dernière et de la plus longue des persécutions, celle de Dioclétien.

Pour quel bilan ? Bien difficile à déterminer, tant un grand nombre de prétendus martyres de chrétiens ne furent à l'évidence en rien motivés par la religion, mais le résultat d'agressions, de querelles ou de rixes aux motifs variés - victimes récupérées ensuite par l'appareil de propagande chrétien. Probablement le bilan global des véritables persécutions n'a-t-il pas excédé les 5000 exécutions en deux siècles et demi, soit une moyenne de... 20 morts par an, ce qui, on me le concédera, pour une société soi-disant violente, brutale, intolérante et sanguinaire est singulièrement... insignifiant. Rappelons que les très chrétiens États-Unis d'Amérique exécutent annuellement plus de 40 personnes tandis que plus de 3000 autres y sont dans les couloirs de la mort.

La persécution des chrétiens dans l'Empire romain telle qu'elle est exploitée par l'Église depuis deux mille ans pour dissimuler ses propres crimes, bien réels ceux-là, systématiques parfois, d'une autre ampleur et d'une toute autre nature en tout cas (puisque, eux, c'est bien la liberté de conscience qu'ils visent), est donc une pure propagande. On aurait aimé que nos médias le disent, qu'ils interrogent au moins quelques historiens compétents plutôt que de répercuter comme des cloches les mensonges pontificaux ; probablement est-ce trop demander au pays du chanoine de Saint-Jean-de-Latran !

Rappelons pour finir cette phrase du grand catholique Louis Veuillot (1813-1883), qui semble chaque jour un peu plus en accord avec la pensée de notre Panzerpape, et que j'ai placée en épigraphe de la troisième partie de ma Quatrième Révélation : "Quand je suis le plus faible, je vous demande la liberté parce que tel est votre principe. Mais quand je suis le plus fort, je vous l'ôte parce que tel est le mien."