Très franchement, je n'ai jamais eu le moindre doute sur la décision que rendrait le Conseil dans cette affaire. Et tout aussi franchement, ce n'est pas au Conseil constitutionnel de faire la loi pour pallier les carences d'un législateur ataviquement réactionnaire. En démocratie, en régime de séparation des pouvoirs, c'est au Parlement de faire la loi, pas au juge constitutionnel. Et la France n'étant pas les Etats-Unis, le Conseil constitutionnel n'est pas la Cour suprême.

Je vais même plus loin : j'aurais eu honte que le mariage gay fût légalisé en lousdé, par l'intermédiaire d'une décision juridique ambiguë et non au terme d'un combat politique, dans lequel les représentants élus de la Nation consacreront - car ils le consacreront, un jour ou l'autre, malgré les combats d'arrière-garde de tous les culs-bénits - solennellement l'égalité des droits de tous les citoyens de ce pays - quelle que soit leur orientation sexuelle.

La vraie question, dans cette affaire, est celle du décalage entre la nation et son expression légale - les parlementaires qui, sur de plus en plus de sujets (euthanasie et mariage gay notamment) ne représentent plus qu'eux mêmes... et le Vatican ! mais on pourrait en dire autant sur l'Europe où ils se sont assis sur le référendum pour adopter le copier-coller d'un traité que le peuple avait rejeté.

L'autre question est de savoir pourquoi les gays, au lieu de demander l'égalité de droits au goutte à goutte, n'ont pas revendiqué, depuis des lustres, et au fil de révisions constitutionnelles toute plus débiles et inutiles les unes que les autres, l'inscription dans la Constitution, comme dans de nombreux pays européens, du principe de la non discrimination sur la base de l'orientation sexuelle. A partir de là tout serait réglé et le Conseil constitutionnel aurait une base réelle, dans un Etat de droit, pour juger au cas par cas des entorses à ce principe clairement inscrit dans la loi fondamentale.

Le PS a raison de dire que, par cet arrêt, la droite est renvoyée à ses responsabilités, la droite des Boutin, des Vanneste, Myard et consort. Il aurait pu dire aussi que les gays sont également renvoyés à leur responsabilité - celle de tirer les conclusions électorales du fait que les gaylib et autres "UMP à visage humain" ne sont que, des alibis, cache-sexe d'une droite, la plus bête d'Europe occidentale, ataviquement homophobe.