C’est une interrogation qui me taraude, en regardant les premières questions au gouvernement cet après-midi, et en bouillant de colère à l’écoute des arguties de Melle Dati, prête à justifier les retours au pire obscurantisme juridico-patriarcal ! Ne se résolvant à faire appel d’une décision de justice aussi injustifiable en principe que tragique dans ses conséquences sur la partie de la population la plus sensible aux archaïsmes religieux et culturels les plus contraires à ce qui fonde un État de droit et cette égalité entre les sexes qu’on s’apprête pourtant à inscrire dans la Constitution. Mais ce gouvernement, il est vrai, n’en est pas à une incohérence près !

Voilà donc que Melle Dati pousse le cynisme, ou la bêtise, jusqu’à prétendre que cette exception de virginité justifiant la nullité d’un mariage a protégé une jeune fille victime d’un mariage forcé. Mais on rêve ! ou on cauchemarde !!! On ne doute pas que Mme Boutin (et la hiérarchie catholique si chère au coeur de notre souverain) se réjouisse(nt) de voir ainsi la virginité considérée comme une condition essentielle du consentement au mariage ; mais les autres ! quelle honte ! ne l’éprouvent-ils pas, les Kouchner, Amara, Hirsch, Pécresse, Kosciusko-Morizet, la honte qu’il y a à continuer à siéger dans pareil gouvernement ?

Il paraîtrait que c’est le président de la République qui a « convaincu » Melle Dati d’interjeter appel, hier, de cette décision scandaleuse. Une décision intervenue… début avril. À cause de son caractère inacceptable en principe ? Non bien sûr, sinon il n’aurait pas tant attendu ; seulement parce que notre Caligula a sans doute compris que la position de sa ministre était en train de lever une vague d’indignation dans l’opinion. C’est dire l’absence totale de cohérence de ce gouvernement de réactionnaires et d’irresponsables, de ce ramassis hétéroclite d’amateurs, d’incapables et d'apprentis-sorciers. Mais dans quel pays sommes-nous au juste, où il faut que le président sermonne sa créature pour la ramener au simple bon sens ?! Où il faudrait arguer, pour protéger les jeunes filles du mariage forcé, de leur « faute » antérieure audit mariage. Mais Melle Dati se rend-elle compte de la monstruosité de cet argument ?! des monstruosités auxquelles ce jugement ouvre la voie ?! Melle Dati, pendant qu’elle y est, n’envisagerait-elle pas de rétablir les lois de Vichy sur l’adultère ?

Voilà donc une péronnelle qui a menti sur ses titres universitaires avant d’accéder à LA fonction qui, entre toutes, dans la République, devrait requérir la plus scrupuleuse honnêteté ; voilà une ambitieuse dont l’ascension ne doit rien aux compétences ni à l’expérience, mais tout à la faveur du prince, ou plutôt de l’ex-épouse du prince ; voilà une jeune femme qui compense son défaut d’autorité naturelle par une caricature de l’autoritarisme de son patron, qui est incapable de garder ses collaborateurs et encore plus de diriger ou d’inspirer le respect au grand corps judiciaire à la tête duquel l’a placée Caligula ; voilà une parfaite représentante du bling-bling sarkozien qui s’affiche dans les magazines en top model habillée par des grands couturiers alors qu’elle a à gérer les prisons les plus scandaleusement médiévales d’Europe occidentale ; voilà une femme politique qui n’a ni le moindre sens de la décence, ni la compétence, qui s’attaque un jour à la non rétroactivité de la loi pénale, fondement de tout État de droit, qui se montre en dessous de tout dans le débat technique majeur que suppose une révision constitutionnelle, provoquant le mépris à peine voilé des députés et de leur président, et qui fait appel d’une décision tout en continuant à la justifier, non sur le principe, ce qui est le rôle du garde des Sceaux, mais sur des questions d’opportunité, c’est-à-dire avec des arguments totalement étrangers, justement, à ce qu’est le droit, comble de l’absurde pour un Garde des Sceaux !

Malaise ! Haut-le-cœur ! Nausée ! Révolte ! Je le dis tout net : Melle Dati me dégoûte !!!