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lundi 17 mai 2010

Aujourd'hui Journée mondiale contre l'homophobie !

L'auteur de La Quatrième Révélation est bien sûr concerné et solidaire : partout dans le monde, aujourd'hui, on agresse, on violente, on emprisonne, on torture, on tue des gens à cause de leur désir, de la manière dont ils aiment et jouissent, de l'apparence qu'ils ont.

C'est monstrueux, et cela nous vient, faut-il le rappeler, des trois grandes religions monothéistes. Point de persécution de "ceux qui couchent avec un homme comme on couche avec une femme" avant Le Lévitique et Paul de Tarse. Le lévitique est un des textes les plus bêtes et les plus violents de l'histoire de l'humanité, les épitres de Paul l'ont recyclé dans le christianisme ; l'islam n'est pas en reste : on pend les homosexuels en Iran, et la situation n'est guère plus brillante dans la plupart des pays musulmans - que l'hypocrisie y règne ou non sur les pratiques, la loi y rend toujours possible la persécution lorsqu'on a besoin de boucs émissaires à livrer aux intégristes, comme ce fut le cas récemment en Egypte.

Mais ces textes, Lévitique et épitres, figurent dans la Bible hébraïque pour le premier, dans le canon de toutes les églises chrétiennes pour les secondes. Ils sont au fondement même de ces religions : tant qu'il en sera ainsi, tous les frustrés et les intégristes de la terre trouveront dans la parole divine la justification de leur homophobie, la légitimation de leur violence. Ce qui est en cause, ce n'est donc pas le discours plus ou moins hypocrite des représentants institutionnels des religions, des Eglises et des cultes, mais les textes sur lesquels ils se fondent.

Vive la Journée contre l'homophobie donc ! et à quand une Journée mondiale contre le capitalisme dérégulé et mondialisé qui lui aussi violente torture et tue. Pas plus que l'homophobie n'est indifférente à la nature même des monothéismes, la "crise" n'est pas indifférente à la nature même de ce capitalisme.

Et comme les monothéismes qui vouent les homosexuels à la mort au nom d'un Dieu d'amour, les capitalistes sont schizophrènes : on en a encore eu une parfaite illustration ces derniers jours : il y a deux semaines les "Marchés", entité métaphysique aussi convaincante que le Saint Esprit, plongeaient à cause des déficits publics européens.

Résultat ? les Etats qui, depuis trente ans, ont abandonné tous les moyens d'action sur l'économie dont ils disposaient, sauf celui de matraquer les peuples par la fiscalité ou la "modération salariale", mettent en place, avec plus ou moins de zèle et de violence, des politiques visant à réduire ces déficits.

Résultat ? Depuis, les marchés baissent parce que ces politiques vont casser la consommation, donc la croissance, donc les recettes des Etats et vont donc faire augmenter à terme leurs déficits publics qu'elles voulaient réduire. On appelle ça la déflation ; on sait cela depuis longtemps déjà... cette politique, en 1935, a été tentée par Pierre Laval et elle a échoué, avant et depuis, partout où elle a été mise en œuvre.

Les Marchés veulent donc une chose et son contraire, et ils dictent aux Etats, qui leur obéissent au doigt et à l'œil, une chose et son contraire. Belle boussole !

La vérité, c'est que l'euro nous a enfermés dans une seringue mortelle. Mais la leçon que nous donne l'histoire, sur ce genre de seringue, c'est qu'on en sort rarement - jamais ? - sans de graves convulsions, intérieures et internationales, dont les peurs, les haines, les violences - l'homophobie comme les autres - sont souvent les principales gagnantes.

mercredi 5 mai 2010

La Grèce, victime de l'euro

J'ai déjà dit ici maintes fois la responsabilité écrasante que portaient les Mitterrand, Attali, Guigou, Delors et consort d'avoir, sous prétexte d'Europe, enfermé les économies européennes dans le corset de fer, étouffant, écrasant, mortel, d'un Deutschmark rebaptisé euro. Il n'est qu'à regarder les courbes des croissances européenne et américaine : elles se croisent à Maastricht.

Cette politique, couplée avec le libre-échangisme le plus débridé, qui met en concurrence des économies à fort niveau de protection sociale avec des économies quasi-esclavagistes - fussent-elles communisto-libérales - et avec la dérégulation financière, ne pouvait aboutir qu'à une catastrophe : nous y sommes.

Cette politique a été conçue par des économistes libéraux qui se veulent des scientifiques et qui ne sont que des idéologues. Elle se donne, comme tous les totalitarismes, depuis le chrétien, pour une vérité révélée. Elle a vidé de l'essentiel de sa substance la démocratie, puisque les gouvernements élus, qu'ils soient de droite ou de gauche, doivent se plier à cette révélation.

L'euro n'est pourtant pas qu'une catastrophe ; c'est une absurdité. On ne peut avoir de monnaie unique dans une zone économique qui n'a ni politique fiscale commune, ni politiques économiques communes. On ne peut avoir de monnaie commune régie par les règles dictées dès l'origine par l'Allemagne, en fonction de ses intérêts, de ses contraintes et de ses peurs (le retour à l'hyperinflation des années 20), alors que les autres pays ont des intérêts, des contraintes, des forces et des faiblesses différents.

On nous parle de vertu allemande ! la belle affaire... L'Allemagne, c'est son droit et son devoir, mène la politique de ses intérêts. Son histoire et la structure de son économie s'accommodent de cette vertu. Tant mieux pour elle ! Mais si tous les pays d'Europe avaient la même structure économique et s'ils s'imposaient la même vertu, l'Allemagne serait en faillite parce qu'elle ne vendrait plus rien à ces pays-là qui, par leur déficit même, font tourner l'économie allemande.

La réalité c'est que l'euro fort, la fin de la préférence communautaire et la destruction du tarif extérieur commun dont lady Thatcher, les droites et les sociaux-démocrates convertis au libéralisme le plus borné ont eu la peau, joints à l'absence de ces deux soupapes économiques fondamentales que sont l'inflation (qui fait payer le capital) et la dévaluation nous conduisent droit dans le mur, en faisant des salaires et des seuls impôts qui pèsent sur les revenus du travail et la consommation, les uniques variables d'ajustement.

Hier, la finance folle, que les Etats, par le biais de la construction européenne, ont libérée de toute contrainte, a conduit le monde au bord du gouffre. Elle a obtenu que les Etats non seulement la renfloue pour éviter l'implosion du système, mais qu'ils s'endettent massivement pour éviter une dépression encore plus ravageuse que les conséquences du krach.

On nous dit que les banques ont remboursé les Etats - des avances de trésorerie qu'elles ont reçues directement, peut-être. Des incalculables dégâts qu'elles ont provoqués, certainement pas.

Ces dégâts-là, c'est aux peuples désormais qu'on en présente l'addition. FMI et Europe solidairement ont entrepris de commencer par le matraquage des Grecs qui avaient élu en octobre un gouvernement socialiste sur un programme de relance par le pouvoir d'achat. Il faut préciser que la Grèce a déjà été durement sinistrée par l'euro : les prix y ont bondi en quelques années au niveau de l'Europe de l'ouest tandis que les salaires restaient à un niveau grec - d'où une hausse rapide de l'endettement des ménages, dans un pays où il était quasi inexistant.

Une fois encore, l'Europe s'en prend donc directement à la démocratie et l'on force ce gouvernement à mettre en oeuvre la politique exactement inverse au programme sur lequel il a été élu il y a moins de six mois. Comment mieux signifier au peuple grec, à tous les peuples d'Europe et du monde, que la démocratie ne signifie plus rien ? Plus rien. Comment s'étonner que les peuples ne recourent à l'abstention et aux votes populistes pour signifier leur défiance de plus en plus dégoûtée vis-à-vis d'une démocratie qui n'est plus que d'apparence ?

Par charité... païenne, je me garderai d'ironiser sur le fait que c'est à deux "socialistes", une fois de plus transformés en fidèles valets des marchés, MM. Strauss Kahn et Papandréou, qu'il revienne d'exécuter les basses oeuvres consistant à détrousser le peuple grec - c'est tout dire de la faillite intellectuelle, du naufrage idéologique, de la bérézina morale, du waterloo politique d'une social-démocratie européenne blairisée, c'est-à-dire thatcherisée.

Aujourd'hui, les Grecs sont en grève générale. Moi aussi, avec eux. Non que je pense qu'il n'y ait pas de lourdes réformes de structure à faire dans ce pays. Ce pays a une histoire, des héritages, des habitudes - mauvaises pour certaines, sans doute, mais je tiens à la disposition de la chancelière allemande quelques analyses sur l'Allemagne qui valent bien ces défauts-là ! Il n'a cessé non plus d'être l'objet d'ingérences étrangères, anglaise notamment puis américaine. Ces puissances, après l'ottomane, ont imposé la perpétuation d'un Etat dont le clientélisme a été historiquement la manière de pallier l'inexistence d'Etat providence. Si beaucoup de Grecs sont fonctionnaires, c'est parce que la sécurité sociale est faible, l'hôpital public dans un état dramatique, les allocations familiales inexistantes, etc. L'emploi dans la Fonction publique a été, et est encore, un mode de redistribution, ces fonctionnaires ayant, pour nombre d'entre eux d'ailleurs, un second emploi.

Il y a donc des réformes à faire en Grèce. Mais pas celles qu'on lui impose, ni de la manière, insultante, humiliante, dont on les lui impose. Avec l'incroyable morgue allemande en prime. La politique que le FMI et l'Europe vont appliquer en Grèce s'appelle la déflation. Elle a été tentée en France, en 1935, par Pierre Laval. Ailleurs par d'autres... et tout cela a fini en guerre mondiale. Elle consiste à couper drastiquement dans les dépenses publiques et les salaires. Elle a échoué partout où elle a été appliquée, parce qu'en cassant la consommation, elle casse la croissance : la Grèce a des déficits (qui ont explosé à cause des banques qui assassinent aujourd'hui ce pays), mais elle avait une croissance forte (plus de 5%, je crois, en 2009) ; elle sera, au mieux, en récession de 3 % en 2010.

Or, quand la croissance s'effondre, les recettes fiscales en font autant. Surtout dans un pays où la fiscalité est illégitime parce qu'elle a été l'instrument d'écrasement du peuple pendant quatre siècles par le pouvoir ottoman, puis par des régimes souvent autoritaires et dictatoriaux, téléguidés de l'étranger, qui ont installé durablement l'idée d'un Etat prédateur qu'il est légitime de frauder. Culturellement, le FMI et l'Europe ne peuvent être perçus aujourd'hui par les Grecs que comme les héritiers de ces ingérences, et le gouvernement grec à qui ils imposent cette politique comme l'héritier de ces régimes de l'étranger : la politique qu'on est en train d'imposer aux Grecs ne pourra donc que renforcer cette défiance et cet a-civisme fiscal - exactement le contraire de ce qu'il conviendrait de se fixer comme but pour assainir durablement la situation.

L'Europe et le FMI de Strauss Kahn ne sont que de ridicules médecins de Molière, mais à force de saigner et de purger le peuple grec, ils ne parviendront à rien, sinon à déstabiliser une société fragile, sortie de la dictature américaine il y a seulement 35 ans. A la déstabiliser durablement.

Car lorsque les recettes fiscales s'effondrent, on doit bien sûr de nouveau couper dans les dépenses. Il faut être bête comme un libéral - ces gens-là, comme les émigrés de la Révolution française, ne comprennent ni n'apprennent jamais rien -, pour ne pas se rendre compte que ce qu'on est en train d'enclencher aujourd'hui en Grèce, demain en Europe, c'est une ravageuse spirale déflationniste. Une spirale de pauvreté, de misère, de troubles politiques - une logique criminelle de guerre ?

Tandis que, dans le même temps, l'Europe n'est pas même capable de taper du poing sur la table, à Ankara, pour que cessent les agressions, les menaces et les provocations turques, permanentes, qui forcent la Grèce à devoir assurer la charge d'un budget militaire disproportionné dont, il est vrai, les marchands d'armes européens et américains sont les principaux bénéficiaires.

Prenons garde seulement que les peuples ne se laisseront pas indéfiniment matraquer, humilier, insulter, priver de toute souveraineté effective et de démocratie autre que formelle.

Nous étions tous jadis des Juifs allemands ; nous sommes tous, aujourd'hui, des Grecs en devenir !