Vous vous êtes aperçu sans doute combien, depuis six mois un an, le JT de France 2 est devenu un incroyable robinet d'eau tiédasse. Qu'est-ce qui intéresse ces prétendus journalistes, à part les chiens écrasés ? Ce n'est plus un JT, c'est une feuille locale, dans le genre La Vigie fécampoise ou Le Clairon du Bas-Poitou, transposée au niveau national. Si bien qu'après le bébé cuit au micro-ondes par sa maman et par inadvertance ou le scout qui s'est foulé une cheville durant un jeu de piste, le canot pneumatique que le vent a emporté au large sur la plage de Bénodet et la visite de Jacques Chirac au cap Nègre (ça c'est une nouvelle passionnante !), il reste souvent bien peu de temps pour la politique intérieure ou internationale.

On a la télé et les infos qu'on mérite ! C'est comme avec la littérature : voyez ce pauvre grand garçon riche et cocaïnomane lâchement censuré par son éditeur... mais je m'égare.

Bref, hier, malgré tout, au JT de France 2, ils ont trouvé le temps d'un sujet sur les retraites (nous annonçant une réforme pour bientôt : on craint naturellement le pire et je vous fiche mon billet qu'on ne sera pas déçu !). Déjà la chose m'a fait pouffer, quand le robinet d'eau tiède nous a posé la pertinentissime question de savoir pourquoi de plus en plus de gens qui ont accumulé le quota d'années de cotisation nécessaire continuent malgré tout à travailler.

Je veux bien lui répondre au robinet d'eau tiède : c'est parce que, aujourd'hui, quand on travaillé comme une corde toute sa garce de vie comme mes parents qui ont 80 ans, on est dans la gêne. Comme Chirac qui, en plus de se faire héberger gratos par la famille d'un ex Premier ministre libanais d'une moralité irréprochable et à la fortune aussi limpide que la gestion de certaines pièces jaunes, se fait inviter par une richissime ex-vedette de la chanson et sa moitié.

Mais c'est au moment du direct avec Kaboul que j'ai failli m'étouffer. Après nous avoir montré des galipotes glissant leur bulletin de vote dans des poubelles et des lessiveuses afin de réélire un potentat local, merveilleusement habillé par Christian Lacroix et à qui Michèle Alliot-Marie refile régulièrement les bouts de rideaux dont elle se drape, le robinet d'eau tiède interroge sa con-soeur sur le fait de savoir s'il y aurait ou non un deuxième tour à cette parodie de démocratie organisée dans un pays dont les Occidentaux (notamment la moitié de l'ex-vedette de la chanson) sont en train de faire la Suisse du Moyen-Orient.

Et que répond la con-soeur ? je vous le donne en cent, je vous le donne en mille, que, au vu des sondages... Les sondages, en Afghanistan, non mais vraiment, elle nous prend pour quoi la con-soeur ?

Mais le plus beau c'est que ce matin, ça a continué de plus belle, sur France Culture cette fois, où le con-frère de la con-soeur du robinet d'eau tiède nous a informés que le scrutin s'était déroulé "sans incident majeur", pour ajouter dans le même mouvement que "il y a malgré tout eu vingt-trois morts". Veine ! heureusement qu'en France les scrutins ne se déroulent pas sans incident majeur !

Rappelez-moi comment on appelait ça du temps de bon docteur Goebbels : la Propagandagesellschaft, c'est ça ?

Heureusement que chaque soir on a, sur Culture, Onfray parlant de Nietzsche... ça ne compense pas, mais ça console un peu tout de même.