Depuis hier soir, la gogoche éclate rituellement en cris d'orfraie, en imprécations ou en lamentations sur le retour du péril noir en Italie. Il faudrait, un jour, que cette gogoche s'avise que l'effet mécanique du merveilleux projet européen, auquel cette gogoche collabore par principe (que, au mieux, et en dépit de tout évidence et bon sens, elle prétend réformer ou refonder) et dont elle ne parvient à percevoir ni la nature intrinsèque ni qu'il est vital de s'en débarrasser, c'est sa propre mort - cérébrale puis physique.

Car en transférant la souveraineté de la nation, qui vote et choisit entre des projets concurrents, à l'échelon européen où les décisions sont prises par des organismes apatrides, inféodés à l'Allemagne et aux lobbys économiques, hors de tout contrôle démocratique réel (le prétendu parlement européen n'est pas un Parlement et ne le sera jamais), ce projet européen vide l'échelon national de toute prise sur les questions essentielles de la vie de la nation, du peuple.

Et du coup, il vide aussi de toute légitimité et de toute utilité une gogoche dont la légitimité et l'utilité étaient de prétendre changer la condition réelle, la vie réelle des catégories populaires. Puisque, en acceptant, pire en coproduisant, le cadre européen, cette gogoche se prive du même coup de toute possibilité d'action réelle sur la condition et la vie de ces catégories. Puisque, au nom du projet européen, elle collabore avec fidélité et zèle au démantèlement de toutes les protections et redistributions dont la conquête a constitué sa raison d'être.

C'est la raison pour laquelle, partout en Europe, les peuples se détournent de la gogoche, que la gogoche est la première victime de ses propres choix européens, et qu'elle laisse la place à des partis qui ne sont fascistes que dans les fantasmes de la gogoche. Ces partis qui naissent et grandissent partout, à cause du vide généré par le suicide européen des gogoches, sont des partis d'un type nouveau, aux thématiques et à la sociologie composites, dont les caractéristiques dépendent du contexte national dans lequel ils se créent et se développent.

Crier au fascisme, comme crier au loup, ne sert à rien et ne mène nulle part. Ce qui mène quelque part, c'est de comprendre enfin qu'il n'y a aucun avenir, économique, social, démocratique dans l'Union européenne, que l'Union européenne est une machine à faire de l'inégalité, de la pauvreté, du désespoir, du pouvoir oligarchique sans contrôle et que si nous voulons, partout en Europe, sortir de l'impasse politique actuelle, il faut avant tout sortir de l'Union européenne.

Ce n'est pas une condition suffisante - le débat politique entre projets concurrents reprendra ensuite - mais c'est une condition absolument nécessaire. Et tandis que la gogoche SPD allemande a continué, hier, à creuser sa tombe en reconduisant la GroKo merkellienne, les élections italiennes du même hier n'en sont qu'une preuve supplémentaire.

Spécifiquement sur l'Italie, victimes des choix européens mortifères de la caste politique qui a reçu, hier, une cuisante leçon, cet article de mon ami Frédéric Farah.