Si même sur France Culture on se met à dire que le "problème grec" est avant tout allemand, où va-t-on ma bonne dame, je vous le demande ?!

Merci à Jean-Baptiste, fidèle lecteur de ce blog, d'avoir attiré mon attention sur cette chronique : les esprits bougent. Enfin ! J'en suis témoin lors de mes déplacements en province : on peut dire aujourd'hui, sans provoquer l'indignation immédiate et générale, des choses sur "l'Europe" et l'Allemagne qu'il était inconcevable de dire, il y a encore deux ans, sans se faire accuser de "faire le jeu"... Oui, enfin, l'imposture criminelle se révèle aux yeux de certains. Mais grands dieux, que tout cela est long ! Et en réalité privé de tout débouché politique... pour combien de temps encore ?

J'écris depuis des années que l'aveuglement de l'Allemagne, de l'UE et des "élites" grecques qui s'en sont faites le relais servile mènerait à une catastrophe, non seulement économique et sociale, mais démocratique. Et que sans doute seul le souvenir de la guerre civile a empêché jusqu'ici le désespoir qu'on a systématiquement cultivé depuis bientôt dix ans en Grèce de se transmuer en violence politique. J'écris depuis des années, ici et ailleurs, que cela ne peut que mal finir, très mal et probablement dans le sang.

Dans mon Tigrane l'Arménien, dont une partie se déroule dans l'Athènes de la crise, je mets en scène un Grec, membre d'une association de citoyens européens baptisée TINA, qui exprime toute la révolte et toute la fatigue d'un peuple qui subit depuis bientôt dix ans une politique criminelle et sans issue - une association qui commet un attentat symbolique au coeur même su système européen de démontage de la démocratie, une association qui somme des "élites" aveugles et sourdes aux conséquences humaines de leur politique inhumaine et criminelle de restituer aux peuples le pouvoir qu'elles leur ont confisqué sous prétexte "d'Europe".

Hier, Loukas Papadimos a été blessé dans sa voiture, à Athènes, par une lettre piégée.

Papadimos le banquier, gouverneur de la Banque centrale de Grèce puis vice-président de la BCE, bénéficiaire en 2011 du coup d'Etat européen contre le Premier ministre issu des élections, l'homme qui a fait entrer l'extrême droite au gouvernement pour la première fois depuis 1974, l'homme qui a fait adopter le deuxième Mémorandum en février 2012.

Ceci est sans doute une étape - si prévisible ! Mon seul étonnement est qu'elle n'ait pas été franchie plus tôt.