Je soutiens naturellement, pleinement et sans aucune réserve, nos forces de l'ordre et nos militaires présents sur le terrain.

Il me semble que la proclamation de l'état d'urgence est justifiée, dans la situation où nous sommes, exceptionnelle, afin de laisser aux forces de l'ordre la latitude de bousculer, déstabiliser ou démanteler des filières criminelles susceptibles de préparer de nouveaux attentats.

Je suis opposé à toute modification de la Constitution pour des raisons de convenance et dans l'urgence. On ne doit toucher à la Constitution qu'avec une main tremblante et on y a déjà trop touché - pour des motivations subalternes, avec des résultats généralement calamiteux et en la dénaturant gravement.

Si l'état d'urgence doit être renouvelé, que le gouvernement aille devant le Parlement pour expliquer à la nation les raisons qui justifient à ses yeux cette prorogation et que le Parlement tranche. Je ne vois pas qu'il y ait matière à modifier délais et procédures en la matière.

Je considère que la modification de la Constitution ou la proposition d'ajout de nouvelles mesures législatives ou administratives sont de nature liberticides et qu'elles ne sont pas nécessaires. La démocratie doit lutter contre la barbarie avec ses moyens et ses valeurs, pas en mettant ses valeurs sous le tapis. Je considère, derrière le juge Trévidic que je trouve en tout et pour tout convaincant, que la question n'est pas aujourd'hui celle de l'arsenal législatif - il est suffisant -, mais celle des moyens sur le terrain, notoirement dérisoires par rapport à l'ampleur de la menace. Et, à cet égard, les annonces faites au Congrès me paraissent très insuffisantes.

Je ne fais aucune confiance à une classe politique globalement faillie pour nous sortir des impasses dans lesquelles son eurolâtrie, sa germanolâtrie, sa vénération de la monnaie, de la concurrence et du Marché nous ont enfermés depuis plus de trente ans.

Je ne fais aucune confiance à une classe politique globalement faillie qui a détruit notre politique étrangère, là aussi sous prétexte d'Europe, en l'alignant sur les Etats-Unis (et au Proche-Orient sur les intérêts d'Israël). La politique extérieure commune n'est jamais, et ne peut être autre chose qu'un compromis a minima entre des intérêts divergents dont le résultat a été d'éteindre la voix de la France et de mettre notre diplomatie dans les mains de Washington. Cette classe politique globalement faillie a abandonné la politique arabe de la France initiée par le général de Gaulle et dont Villepin a été le dernier défenseur. Elle s'est abandonnée à une stupide hystérie anti-russe, téléguidée de Washington, alors que la Russie est notre alliée naturelle. Alors que la politique américaine, à l'égard d'Al Qaïda d'abord (Ben Laden fut longtemps appuyé par la CIA), puis en Irak (attaque illégale d'abord, politique anti-sunnite ensuite) est le premier et le principal responsable de la situation dans la région aujourd'hui. Elle a multiplié les défauts d'analyse, les bévues, les erreurs stratégiques et les fautes tactiques en Libye comme en Syrie, disséminant des armes qui se retournent aujourd'hui contre nous.

Elle a cultivé une incroyable et criminelle connivence avec les monarchies du Golfe, singulièrement l'Arabie et le Qatar, dont certains de nos responsables politiques se sont faits des agents rémunérés pour des conférences bidon et leur ont accordé en France des privilèges exorbitants, alors que ces Etats tribaux sont historiquement les métropoles culturelles et financières de tous les fondamentalismes et djihadismes, qu'ils forment et financent les imams radicaux qui prêchent, ici et maintenant, la haine et le combat contre les valeurs de la République.

Cette classe politique globalement faillie a également sombré dans un aveuglement criminel à l'égard de la Turquie d'Erdogan. Car la Turquie d'Erdogan est un maillon essentiel de la stratégie de Daesh. La Turquie d'Erdogan n'a jamais été le représentant d'un islamisme modéré (comme ont essayé de nous le faire croire pendant une décennie les Guetta et autres nullités médiacratiques), elle a adopté une démarche progressive de réislamisation, plutôt que d'imposition brutale, mais elle partage les buts ultimes de tous les fondamentalismes musulmans. La Turquie d'Erdogan est un des principaux financiers et alliés objectifs de Daesh aujourd'hui : blanchiment par les Turcs du pétrole, des céréales ou du coton qui nous sont ensuite revendus. La Turquie d'Erdogan prétend combattre Daesh alors qu'elle bombarde les Kurdes qui combattent Daesh, elle refuse d'accueillir dans ses hôpitaux les blessés kurdes qui combattent Daesh alors qu'elle y accueille les blessés de Daesh, elle laisse se développer ou facilite le trafic d'armes alimentant Daesh. La Turquie d'Erdogan manipule le flot de migrants, refuse de surveiller sa frontière, facilite la submersion des îles grecques, afin d'obtenir la suppression des visas et la libre circulation des citoyens turcs dans l'UE, comme Erdogan l'a encore une fois réaffirmé à la faveur de la récente équipée, hallucinante d'irresponsabilité, de la chancelière Merkel..

Je ne fais aucune confiance à une classe politique globalement faillie qui ne s'est pas même attaquée aux relations interbancaires entre les banques contrôlées par Daesh et le système bancaire international.

Je ne fais aucune confiance à une classe politique globalement faillie qui, depuis cinq ans, a mis à genoux la Grèce, pour satisfaire au rapport psychiatrique des Allemands à la monnaie et à une idéologie euro-libérale mortifère, alors que ce pays occupe une position charnière géostratégiquement, dont dépend aussi notre sécurité.

Je ne fais aucune confiance à une classe politique globalement faillie qui, sous hégémonie américaine et allemande, a construit dans les Balkans des Etats mafieux - Kosovo, Bosnie, Monténégro, ARYM - qui sont d'inépuisables réservoirs pour le trafic d'armes.

Je ne fais aucune confiance à une classe politique globalement faillie qui, depuis trente ans, sous prétexte de franc fort puis d'euro, sous prétexte de mondialisation et de libre-change, a détruit les écluses douanières afin de mettre en concurrence des travailleurs protégés avec des semi-esclaves et de maximiser ainsi les profits de ceux dont, après l'effondrement du bloc de l'Est, la cupidité n'a plus connu de limites et qui entendent aujourd'hui accaparer la richesse, généraliser la précarité, détruire l'Etat social, politique qui a entrepris de liquider notre potentiel industriel au profit du miroir aux alouettes des services et de la haute technologie, condamnant ainsi les plus faibles à un chômage de masse, sans fin et sans issue. Une classe politique globalement faillie qui, par ces politiques irresponsables, a mis l'Etat dans l'incapacité de remplir ses missions, réduit le format et les moyens de notre armée, de nos forces de sécurité, de nos douanes, de nos services de renseignement, qui a abandonné la surveillance de nos frontières au nom de l'eurolâtrie, facilitant ainsi la libre circulation des criminels et tous les trafics, à commencer par celui des armes. Une classe politique globalement faillie qui nous a enfermés dans une logique austéritaire criminelle et une stagnation/récession sans fin, résultant d'une monnaie absurdement gérée par une banque centrale absurdement indépendante, avec pour conséquences le recul de l'Etat qui protège, qui aménage, qui enseigne et qui soigne, qui devrait créer les conditions de la croissance alors qu'il n'est plus que l'instrument servile d'une idéologie euro-allemande suicidaire, l'abandon de territoires entiers où se sont enracinés au fil des ans le chômage, l'absence de perspectives, la perte de crédit d'un discours sur les valeurs de la République qui apparaît vide de sens dès lors que cette République, pour cause de soumission aux dogmes de la Germano-Europe, s'est condamnée à l'impuissance, la criminalité, la haine et, au final, la barbarie...

Je ne fais aucune confiance à une classe politique globalement faillie qui, sous prétexte d'Europe, laquelle n'a jamais été, n'est et ne sera que Marché roi et oligarchie hors-sol, a abandonné le terrain de la nation à l'extrême droite et démonté l'école publique et laïque, au profit d'une vague animation culturelle, en renonçant à l'exigence, à l'effort, à la discipline, à la transmission de savoirs - à commencer par l'histoire nationale. Car la nation, avec ses symboles - le drapeau, La Marseillaise, la devise, Marianne - sont les puissants moyens d'identification, d'inclusion, de partage d'un passé et d'adhésion à un projet commun, sans lesquels on n'est plus une communauté, une République, une démocratie, mais un ensemble d'individus en concurrence, sans lesquels, la nature ayant horreur du vide, s'installent la recherche éperdue d'identités alternatives - quartier, religion, bande criminelle - et la guerre de tous contre tous.