L'excellent blog d'Olivier Berruyer donne la traduction française d'un article du ministre grec des Finances Varoufakis dans le ''New York Times'' du 17 février.

Il faut lire aussi le commentaire de Berruyer. Comme lui, je suis persuadé - je l'ai écrit maintes fois ici - que Merkel (laquelle a fait demander par son ambassadeur à Athènes, selon la presse grecque, le remplacement de Varoufakis : on rêve ou on cauchemarde ! La chancelière du Reich, prétendrait donc désormais, choisir ses interlocuteurs, faire et défaire les gouvernements...) a décidé de sortir de l'euro (sans doute depuis un moment), que le QE de la BCE a levé ses derniers doutes, car c'est une inacceptable offense aux dogmes monétaires allemands, et que le jeu actuel de l'Allemagne consiste à faire porter la responsabilité de l'explosion de l'euro par la Grèce...

Mais pour en revenir à Varouf, son article est passionnant. Parce que dans le tohu-bohu des chiens de gardes médiatiques qui, depuis le 25 janvier, prennent leur désir pour des réalités en affirmant que le gouvernement grec finira par plier et passer sous les fourches caudines de la dictature européenne (lire à ce sujet la salutaire tribune dans ''Libération'' du professeur belge de théorie du droit Laurent de Sutter), qu'elle est isolée et donc qu'elle a tort (de Gaulle, isolé, avait tort en 1940), et que, de toute façon, il n'y a pas d'autre solution que la capitulation, parce que dans ce tohu bohu, il replace les choses à leur place :

"La grande différence entre ce gouvernement et les gouvernements grecs précédents est double : nous sommes déterminés à entrer en conflit avec les puissants intérêts particuliers afin de permettre à la Grèce de redémarrer et de gagner la confiance de nos partenaires. Nous sommes également déterminés à ne pas nous laisser traiter comme une colonie fiscale à laquelle certains peuvent imposer comme bon leur semble toutes les souffrances qu’ils jugent nécessaires. Le principe qui demande l’imposition de l’austérité la plus sévère à l’économie la plus déprimée serait ridicule s’il n’était la cause d’autant de souffrance inutile."

"Le problème (... c'est) que nous vivons dans un monde où l’on est entravé par la peur des conséquences. Dans un monde où il n’existe aucune circonstance où nous devons faire ce qui est juste, non pas en tant que stratégie, mais simplement parce que c’est… juste.

Nous mettrons un terme, quelles qu’en soient les conséquences, aux accords qui sont mauvais pour la Grèce et pour l’Europe. Le jeu « étendre et prétendre » étendre les dettes et prétendre que tout va bien – NdT qui a commencé après que la dette de la Grèce est devenue telle, en 2010, que notre pays ne pouvait plus l’honorer, s’arrêtera. Plus de prêts – pas tant que nous n’aurons pas un plan crédible pour faire repartir l’économie afin de rembourser ces prêts, aider la classe moyenne à se relever et régler cette effroyable crise humanitaire. Finis les programmes de « réformes » qui visent les retraités pauvres et les pharmacies familiales tout en laissant intacte la corruption à grande échelle."

"La principale influence est Emmanuel Kant, le philosophe allemand qui nous a enseigné que les hommes rationnels et libres échappent à l’emprise de l’opportunisme en faisant ce qui est juste.

Comment savons-nous que notre modeste programme politique, qui constitue notre ligne jaune, est juste selon la formulation de Kant ? Nous le savons en regardant dans les yeux les gens affamés dans les rues de nos villes ou en contemplant notre classe moyenne à bout de souffle, ou en prenant en compte les intérêts de tous les hommes et femmes qui travaillent dur dans toutes les villes et villages de notre union monétaire européenne. Après tout, l’Europe ne retrouvera son âme que lorsqu’elle regagnera la confiance de son peuple en plaçant les intérêts de celui-ci avant toute autre considération."

Et toc !