Villepin, Pasqua et maintenant le Parrain ! On voit qu'ils ne sont plus aux pouvoirs, les pôvres !

Ca vous a quand même quelque chose de rassérénant, dans ce monde de brutes, que la justice finisse malgré tout par passer, qu'il y ait encore des juges assez courageux pour braver le Parquet aux ordres qui, demain, sera seul à décider des poursuites.

Même si cette justice-là est fonction de coups tordus des parrains d'aujourd'hui - vipères élevées dans le sein douillet des Pasqua et Chirac d'hier.

Même si la justice passe vingt ans trop tard.

A ce sujet, le concert de la Nomenklatura se lamentant sur un pauvre vieux qu'on traîne devant les tribunaux alors que tout cela est si loin, est à mourir de rire.

Pourquoi si tard ? sinon parce qu'on a bloqué les actions lorsqu'elles auraient dû avoir lieu. J'ai eu l'occasion d'écrire ici que la prescription était l'un des droits inaliénables de l'homme. Mais il ne faut pas confondre prescription et abus de position dominante, et il est bien normal que la prescription soit suspendue pendant le temps où ces personnages sont en position de faire obstacle à la justice.

Et puis tout cela est-il tant du passé ? D'abord, nous, les contribuables parisiens, les emplois fictifs de la Chiraquie, les Corréziens salariés juste pour assurer la réélection du parrain, on les a bel et bien payés. Et on aimerait, faute de revoir nos sous, avoir la satisfaction morale de voir l'honneur des coupables publiquement flétri - si coupables il y a. Bien sûr, tout cela a un peu des airs d'Al Capone coincé pour fraude fiscale ; mais coincer Al Capone pour fraude fiscale, ça n'est déjà pas si mal.

Ensuite... dites-moi donc de quel sérail sort Caligula ? et pourquoi le couple - condamné en justice - qui règne sur Levallois-Perret alors que la loi et la décence auraient dû à jamais exclure M et Mme B. de tout mandat électif, est de tous les voyages caligulesques ? Levallois-Perret a-t-il une importance internationale telle qu'on ne puisse se passer de ces gens qui ont à ce point ignoré ce qu'est la morale publique ?

On interrogeait récemment, dans nos étranges lucarnes, une des femmes que j'admire le plus en ce bas monde, la juge Eva Joly, sur le fait de savoir si, par hasard, il y aurait un lien entre la dégringolade, ces deux dernières années, du nombre d'instructions ouvertes par le pôle financier et la dégringolade de la France au palmarès de je ne sais plus quel observatoire mondial de la corruption.

Elle a été parfaite comme d'habitude : incisive, ironique, juste. Et l'on sentait que, malgré sa retenue nordique, elle avait une envie folle de demander au journaliste de qui, dans cette affaire, on se payait la tête ; si casser un thermomètre est le meilleur moyen de combattre l'infection qui provoque la fièvre.

La tête qu'on se paye ? Celle du peuple évidemment - comme lorsqu'on s'assoit sur le résultat d'un référendum pour faire passer, grâce à la veulerie de parlementaires socialistes, la copie conforme d'un traité que le peuple a massivement rejeté.

Mais à force de mépriser le peuple, de se payer sa tête, à force de s'enfermer dans un autisme de Nomenklatura sourde et aveugle, convaincue qu'elle est légitime à vivre sur la bête, le peuple, je l'espère, finira par prendre un gros coup de sang... et qui sait si on ne se demandera pas pourquoi, alors, c'est lui qui en exige - des têtes. Les Nomenklaturas de fin d'Anciens Régimes se demandent toujours pourquoi il leur arrive ce qui leur leur arrive...