J'écrivais hier dans ce blog que Caligula-Sarko "menace dès qu'il le peut les libertés publiques" : Edvige, rétroactivité de la loi pénale, arbitraire en matière d'expulsions érigé en règle, renvoi décidé à l'Elysée de tel patron de presse ou de tel journaliste condamnés pour impertinence par l'ombrageux souverain... les exemples ne manquent pas, sans même parler du démontage systématique de la protection sociale qui est partie intégrante de notre modèle démocratique, et devraient alarmer dans une démocratie saine encore dotée d'anticorps.

Ce n'est hélas que trop peu le cas, et les défenses immunitaires contre le populo-sarko-médiautoritarisme me semblent affaiblies d'une manière alarmante.

J'espère avoir tort, et que, à l'occasion d'un de ces coups de scalpel dont il est coutumier, juste pour voir si le corps social réagit encore aux attaques extérieures ou s'il est parfaitement anesthésié, ce corps social va se réveiller pour de bon et envoyer valser le docteur Frankenstein et tous ses assistants.

En attendant, j'ai entendu hier, médusé, au répondeur de l'excellentissime "Là bas si je suis" de Mermet, une nouvelle hallucinante révélée par l'excellentissime site Rue 89 (deux anticorps qui restent vivaces, heureusement). Une nouvelle sur une nouvelle atteinte à l'une des plus fondamentales des libertés publiques fondamentales.

Le sieur Darcos, ci-devant ministre de l'Education nationale, celui qui juge qu'il y a trop de profs devant les élèves, celui qui considère que les instits de maternelle sont là pour changer les couches et qu'on pourrait les remplacer avantageusement pour les finances de son ministère par des dames de service (comme c'est déjà le cas, à l'hôpital, pour les infirmières par des aides soignantes et pour les aides soignantes par des dames de service), ce Darcos-là a lancé un appel d'offre pour payer, à une entreprise privée naturellement, 100 000 euros par an, auxquels s'ajouteront 120 000 euros pris sur le budget de l'Enseignement supérieur et de la Recherche qui, chacun le sait, se portent si bien en France, où les maîtres de conf à Science po n'ont pas été augmentés d'un centime depuis six ans (j'en sais quelque chose, j'en étais jusqu'à ce que je refuse de continuer à me faire entuber plus longtemps), où la plupart des jeunes chercheurs n'ont ni poste, ni salaire décent, ni matériel, où les labos publics sont réduits à la mendicité, leur patron passant désormais plus de temps à faire des dossiers pour trouver le fric nécessaire à leur survie, qu'à chercher...

Mais dans quel but me direz-vous, cet appel d'offre de 220.000 euros annuels appelés à pleuvoir sur un cabinet d'audit quelconque, comme la manne sur les Hébreux dans le désert ?

Eh bien c'est simple... surveiller les opinions des universitaires et des chercheurs ! On cauchemarde. Non, ce n'est pas l'Italie fasciste des années 1920, la Russie stalinienne, le Portugal salazariste, ni la Roumanie des Ceaucescu où Elena, l'épouse du Danube de la pensée, comme Darcos et Pecresse, attachaient plus d'importance aux opinions des chercheurs qu'à leurs résultats.

Non, cela c'est en 2008 au "pays des Droits de l'homme" où la liberté de pensée et d'opinion a été reconnue en 1789... mais où un tout petit Danube de la pensée est devenu roi... il y a moins de deux ans. Si, si, je vous assure, ça fait moins de deux ans ! ça paraît long, je sais bien ; mais vu le tour que prennent les choses au PS, il est chaque jour plus probable que nous n'en ayons pas fini de si tôt ! Dans quel état en sortiront les faibles, les malades, les vieux, les handis, les gays anormaux et inférieurs non insultés ni par Vanneste ni par Longuet, les chercheurs, les universitaires, les classes moyennes, la République et la démocratie, ça c'est une autre histoire !

Le peuple doit combattre pour la loi comme pour ses murailles, disait jadis Héraclite d'Ephèse. Il serait peut-être temps que le peuple français se réveille et se mette à combattre pour ses libertés comme il combattrait à ses frontières face à un envahisseur. Avant qu'il ne soit trop tard.